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Numéro
Rev. Fr. Geotech.
Numéro 164, 2020
Numéro d'article 2
Nombre de pages 23
DOI https://doi.org/10.1051/geotech/2020023
Publié en ligne 2 novembre 2020

© CFMS-CFGI-CFMR-CFG, 2020

1 Introduction

Le Pont du Gard est édifié au débouché des gorges du Gardon, à l’extrémité sud-est d’un vaste ensemble calcaire Barrémien à faciès urgonien. Le pont-aqueduc et le pont routier attenant sont fondés sur un entablement calcaire échancré par un goulet étroit dans lequel s’inscrit le lit mineur du Gardon. Si les calcaires se présentent en gros bancs, formant un ensemble compact, homogène et résistant, les massifs rocheux de fondation des piles VII et VIII situés de part et d’autre du goulet, sont la source de nombreux questionnements depuis près d’un siècle. La problématique tient à la morphologique particulière de ces massifs dont les flancs subverticaux, voire en surplomb, plongent à près de vingt-cinq mètres de profondeur en dessous du niveau de fondation. Le goulet accueille une hauteur variable d’alluvions, dont le toit évolue au gré des crues violentes qui singularisent le Gardon. Au-dessus et à l’étiage, la hauteur d’eau varie de dix à quinze mètres. Dans le site, la stratification du massif calcaire est subhorizontale. Le massif est découpé par une famille principale de discontinuités subparallèles aux flancs du goulet. Comme observé dans toute la région, les calcaires urgoniens sont le siège d’un réseau karstique marquant.

Historiquement, les interrogations suscitées par les massifs de fondation des piles VII et VIII ont été révélées progressivement, à la faveur du développement des investigations subaquatiques. Il est apparu que les parois du goulet sont entaillées par des cavités métriques formant des surplombs, sous la pile VII notamment, et faisant craindre une déstabilisation possible de ces appuis rocheux. La découverte de ces cavités dans les années 1930 est à l’origine des travaux de protection des massifs rocheux réalisés en 1949. Les crues du Gardon de 1958 et de 2002 ont tour à tour réactivé ces craintes en suscitant de nouvelles études et des travaux de renforcement des fondations rocheuses en 1981 et 2008.

Le projet de renforcement de 2008 a donné l’occasion d’implanter un dispositif d’auscultation du massif rocheux de fondation de la pile VII à titre exploratoire. Ce dispositif est constitué par deux boulons instrumentés disposant chacun de quatre capteurs extensométriques, mis en place en forage dans la fondation rocheuse. Les huit capteurs et une sonde de température sont raccordés à une centrale d’acquisition qui est implantée dans un boîtier étanche incrusté dans la roche en surface du massif. Des données ont été enregistrées entre 2009 et 2017, avec quelques interruptions liées au disfonctionnement momentané de la centrale d’acquisition ou de la rupture de son alimentation électrique interne. Cet article donne l’occasion de montrer les principaux résultats de cette auscultation.

Un premier paragraphe présente une revue bibliographique destinée à mettre l’accent sur les effets thermiques qui s’observent dans les massifs rocheux sous l’influence des conditions climatiques. Le paragraphe suivant est consacré à la présentation du site, l’historique des travaux de renforcement du massif rocheux, ses conditions environnementales en matière de température atmosphérique et de crues du Gardon. Les principales caractéristiques du dispositif d’auscultation mis en place en 2008 sont présentées ensuite. Le paragraphe quatre décrit les enregistrements de la température et des mesures extensométriques en fonction du temps. Il est fait état des variations saisonnières des déformations qui s’observent ainsi dans le massif. L’analyse de cet ensemble de données apporte des informations inédites à propos du comportement de la fondation rocheuse de la pile VII.

Les cycles annuels sont accompagnés par de petites fluctuations journalières en lien avec les variations diurnes de la température atmosphérique, comme celles souvent révélées en surface et à l’intérieur des massifs rocheux. Avec la progression des enregistrements dans le temps, il a été constaté que des petits épisodes de déformation s’observent principalement en automne et en hiver, en concordance avec des crues du Gardon. Ces variations concernent essentiellement les capteurs situés près de la paroi rocheuse subverticale qui borde le lit du Gardon. L’hypothèse d’un effet thermique des crues du Gardon est mise en avant.

Afin de corroborer l’influence de la température atmosphérique sur les déformations de la fondation rocheuse de la pile VII, une simulation a été effectuée au moyen d’un calcul analytique. Le calcul est réalisé dans un cadre très simplifié afin d’obtenir un ordre de grandeur de ces déformations. Un effet possible d’une crue est simulé aussi. Ces développements font l’objet du paragraphe cinq. Ils permettent d’expliquer effectivement l’ordre de grandeur des déformations observées.

2 Effets de la température dans les massifs rocheux

L’analyse des données issues de l’auscultation du massif rocheux de fondation de la pile VII du Pont du Gard conduit à s’intéresser aux effets de la température dans les massifs rocheux. Cette question touche de nombreux et vastes domaines techniques où elle s’exprime à différentes échelles géographiques. La revue de la littérature qui suit aborde succinctement l’influence de la température sur la déformation de la roche et des massifs fracturés, l’effet des cycles thermiques, l’influence des circulations d’eau dans les milieux discontinus ou karstiques. La présence du Gardon conduit à s’intéresser également à la température des cours d’eau.

2.1 Température dans les massifs rocheux

Rejeb et al. (1990) présentent les résultats du suivi expérimental d’un massif granitique fissuré soumis à un programme de chargement thermique. Le volume instrumenté, dont les dimensions sont 10 × 10 × 5 m, est chauffé dans le but de caractériser les modifications du milieu sur les plans thermique, hydraulique et mécanique pendant le chauffage puis le retour à l’équilibre. D’après les auteurs, cette instrumentation a permis d’obtenir un ensemble de résultats précis et cohérents montrant l’évolution de la température et de la déformation dans la roche. Sur la base des propriétés thermiques du granite mesurées en laboratoire et en se rapportant au cycle thermique mis en œuvre dans le massif, la modélisation du comportement thermomécanique de la roche s’avère en bon accord avec les mesures.

Au-delà de ce type d’expérimentation contrôlée, beaucoup d’études ont été consacrées à l’observation de versants rocheux et de falaises exposés aux sollicitations climatiques. Dans de nombreux cas, les mesures de températures s’intègrent dans un plan d’auscultation plus large qui vise à fournir des informations utiles à l’analyse des déformations et des instabilités rocheuses.

Jenkins et Smith (1990) pointent la très grande variabilité dans le temps des températures mesurées en surface de la roche sur les reliefs montagneux, en fonction du site, de l’altitude, de l’exposition et des conditions météorologiques pour leurs variations diurnes et rapides (température atmosphérique, ensoleillement, couverture nuageuse, vent, précipitations). Au cycle diurne se superposent des petites fluctuations à très court terme et très rapides (de 3 à 15 min). Avec plus de 3 °C/min, les forts taux de variation de la température qui caractérisent ces fluctuations sont de nature à favoriser l’altération de la roche en surface.

Une première question concerne la profondeur de pénétration de la température dans le terrain. D’après la littérature et sur la base d’un site expérimental en Grèce, Florides et Kalogirou (2004) montrent que, au-delà d’un mètre de profondeur dans un sol, la température est généralement insensible au cycle diurne de la température atmosphérique et du rayonnement solaire. Par contre, les variations annuelles de la température s’étendent souvent jusqu’à une profondeur de 9 à 12 m et plus. Williams et Gold (1976) ont proposé une table des profondeurs de pénétration de la température dans les terrains. La profondeur de pénétration de la température peut être définie dans un massif comme la profondeur à laquelle l’amplitude thermique est réduite à un pour cent de son amplitude en surface, par exemple. Cette profondeur dépend de la nature du terrain et de sa teneur en eau. Elle est grande dans les roches (jusqu’à 20 m), les sables humides (15 m) et les argiles humides (18 m). Elle est plus réduite dans les sables secs et les argiles sèches (4,5 et 6,5 m). En conséquence, la profondeur de pénétration de la température peut varier avec les saisons, au gré des fluctuations du niveau d’une nappe (Taniguchi, 1993 ; Anderson, 2005).

Moreno et Froese (2007) et co-auteurs, puis Warren et al. (2014) rapportent les résultats d’un programme d’auscultation destiné à observer l’évolution dans le temps d’une discontinuité rocheuse critique donnant des signes de mouvement. L’expérimentation se situe sur la montagne de Turtle Mountain dans le sud-ouest de l’Alberta (Canada) où une avalanche rocheuse catastrophique s’est déclarée en 1903 (Read et al., 2005). L’auscultation a commencé en 2006. L’instrumentation comprend, entre autres, des sondes de températures implantées en surface de la roche et en forage, entre 2,1 et 17,3 m de profondeur. Comme la température atmosphérique, les températures mesurées dans le massif rocheux présentent des variations saisonnières. Mais ces variations sont de plus en plus amorties et déphasées en s’éloignant de la surface du massif et elles ne pénètrent pas à plus de 15 m de profondeur. Au contraire, les fluctuations journalières ne sont pas mesurables au-delà de 4 m de profondeur. Les mois d’été produisent les fluctuations journalières les plus fortes, contrairement aux mois d’hiver. D’après les données, il semble que les contraintes thermiques jouent un rôle significatif sur la stabilité du massif. Les alternances froides et chaudes des cycles saisonniers engendrent des gradients thermiques qui produisent à leur tour des petits réajustements des blocs rocheux à l’intérieur du massif.

Les données expérimentales se multiplient peu à peu pour apporter de nouvelles séries de mesures des températures en surface de la roche ou en forage, afin de permettre d’affiner les bilans énergétiques dans le cadre des études du permafrost alpin par exemple. Hasler et al. (2011) analysent les profils de température recueillis en surface et dans des petits forages de surface percés dans des parois escarpées à très haute altitude (profondeur de 0,5 m à 5 m). Il apparaît une grande variété de réponses qui, au-delà des conditions topographiques (pente, orientation), témoignent d’une influence très forte des caractéristiques de la surface rocheuse et de la profondeur. Sur la base d’un programme d’auscultation similaire, Magnin et al. (2015) apportent de nouvelles données dans ce sens. Ils pointent notamment l’effet de la couverture neigeuse et de la fracturation de la roche sur le régime thermique de la frange superficielle du massif.

2.2 Température et instabilités

De nombreux facteurs contribuent à favoriser la déstabilisation des pentes rocheuses. Il s’agit notamment des agents atmosphériques favorables au développement de processus physico-chimiques d’altération de la roche et qui contrôlent aussi les cycles de séchage-humidification et les cycles de gel-dégel ou le maintien du permafrost alpin. Ainsi, les sollicitations thermiques qui s’exercent sur les flancs montagneux conditionnent pour partie la stabilité des versants et les risques encourus en aval, en termes de propagation de blocs rocheux ou d’épandage en masse.

Gunzburger et al. (2005) discutent les conditions du déclenchement d’une instabilité rocheuse en France (voir aussi Merrien-Soukatchoff et al., 2010 ; Merrien-Soukatchoff et Gasc-Barbier, 2017). En l’absence de précipitations, de secousses sismiques, ou d’effet de gel-dégel pour expliquer cet événement, les auteurs suggèrent d’attribuer l’instabilité rocheuse à l’effet des variations journalières de température à la surface du massif. Ces variations journalières de température seraient de nature à provoquer une accumulation de déplacements permanents autour des discontinuités dans le massif rocheux et amener progressivement au déclenchement de l’instabilité.

Ce processus de rupture progressive sous l’effet des variations de températures rapides, diurnes et saisonnières a souvent été évoqué dans la littérature, mais il reste difficile à décrire quantitativement. Les sollicitations thermiques cycliques agissent en permanence dans les massifs rocheux fissurés. Les contractions et les dilatations de la matrice rocheuse induisent des concentrations de contraintes le long des discontinuités, qui amènent à des déformations irréversibles et l’accumulation de déplacements permanents par un effet de fatigue thermique (Hall, 1999 ; Mufundirwa et al., 2011 ; Collins et Stock, 2016) ou de propagation de fissures (do Amaral Vargas et al., 2013). D’autres auteurs ont évoqué le jeu de mécanismes de coin qui contribuent à écarter de blocs contigus dans un massif ou pousser des blocs sur une discontinuité plane (Bakun-Mazor et al., 2013 ; Pasten et al., 2015). Aujourd’hui, toutes ces observations incitent à développer plus avant les méthodes de mesures des températures dans les massifs rocheux et enrichir l’ensemble des données expérimentales dans la diversité des situations rencontrées (Moore et al., 2011 ; Moreno et Froese, 2012 ; Read et al., 2013 ; Fiorucci et al., 2018 ; avec les auteurs déjà cités et d’autres).

2.3 Sites remarquables

Dans le domaine des constructions en maçonneries, les problèmes structuraux liés aux variations de température se rencontrent aussi, comme dans les massifs rocheux. Les situations sont diverses (Blasi et Coïsson, 2008). Dans les ouvrages massifs, les forts gradients thermiques liés à la diffusion lente des températures produisent des déformations différentielles qui sont propices à la formation de fissures. Dans d’autres cas, les contacts entre les parties d’un ouvrage soumises à des conditions différentes d’exposition ou la juxtaposition de matériaux de propriétés thermiques différentes sont la source de déformations défavorables en l’absence de joints.

Par leurs effets thermomécaniques, les variations de température momentanées, diurnes et saisonnières sont de nature à dégrader les sites remarquables naturels et historiques constitués ou portés par des massifs rocheux. Quelques cas d’études ont été publiés dans la littérature, concernant des sites naturels (Vlcko et al., 2014 ; Greif et al., 2017) ou des sites historiques (Greif et al., 2006 ; Vlcko et al., 2009 ; Bakun-Mazor et al., 2013 ; Delmonaco et al., 2017). En France, le site de La Roque-Gageac donne un exemple de l’auscultation d’une falaise et du toit d’une grotte située en hauteur, où les instabilités rocheuses constituent une menace forte sur les constructions établies en aval. L’instrumentation vise à quantifier les déformations de la roche et de plusieurs discontinuités critiques en lien avec les cycles météorologiques et dans la perspective de déterminer le rôle de la fatigue thermique dans le massif rocheux (Gasc-Barbier et al., 2015 ; Villarraga et al., 2017).

2.4 Effets des circulations de l’eau et de l’air

De nombreuses observations ont montré l’influence significative des circulations d’eau sur la température dans les massifs rocheux. Ces observations sont rapportées à toutes les échelles, à l’échelle locale des discontinuités (échange d’eau froide ou chaude), à des échelles intermédiaires (aquifères, failles, zones karstiques) ou l’échelle régionale (gradient thermique naturel, hydrothermalisme). L’auscultation de forages implantés dans les massifs rocheux fracturés montre souvent des changements de température marqués qui s’observent localement au passage de discontinuités, de zones fracturées ou de petites failles, où se présentent des circulations d’eau (Ge, 1998). Cette relation entre écoulement d’eau et transfert de chaleur a été mise à profit dans des méthodes d’évaluation des propriétés hydrauliques des aquifères rocheux (Bair et Parizec, 1978) ou des techniques de détection des zones de circulation d’eau dans les massifs fracturés. (Taniguchi, 1993 ; Anderson, 2005). Leur usage a été largement développé en matière d’hydrogéologie et de géophysique dans les domaines miniers et des ressources énergétiques et géothermiques pour caractériser la connectivité de la fracturation et les propriétés hydrauliques des massifs rocheux (Anderson, 2005 ; Read et al., 2013 ; Klepikova et al., 2014). Elles s’appliquent aussi aux reconnaissances en génie civil (par exemple, Stumm et al., 2001). Ces procédés ont permis d’améliorer les méthodes de prévision des arrivées d’eau dans les tunnels profonds à partir de la détection d’anomalies thermiques (Goy et al., 1996 ; Maréchal et al., 1999 ; Rybach et Busslinger, 2013).

Moore et al. (2011) recueillent des mesures de température en surface et dans des sondages profonds et des sondages courts (0,5 à 4 m) dans le site de Randa en Suisse qui a été le théâtre d’une instabilité rocheuse catastrophique en 1991. Ces données montrent une trace du champ des températures dans le massif rocheux et servent à analyser l’impact des circulations d’air et d’eau dans les discontinuités ouvertes et profondes. En hiver, ces discontinuités se révèlent sous la forme d’anomalies thermiques en véhiculant de l’air froid au sein du massif, avec pour conséquence d’engendrer des températures moyennes plus basses qu’attendues.

2.5 Massifs karstiques

Les massifs karstiques sont le siège d’échanges thermiques entre l’eau en transit et la roche, mais aussi et surtout entre l’air et la roche (Luetscher et Jeannin, 2004 ; O’Driscoll et DeWalle, 2006 ; Magne et al., 2017). Les variations de la température dans la roche dépendent donc du type de réseau, de sa configuration et de ses propriétés hydrauliques (niveau de base, capacité de stockage, et autres), des apports d’eau en amont, mais aussi des échanges avec l’atmosphère. Les variations de la température de l’eau portent une information sur la structure du réseau karstique et servent de marqueur dans des méthodes d’évaluation des propriétés hydrauliques des réseaux karstiques (Covington et al., 2011 ; Luhmann et al., 2015 ; et d’autres). Sur le plan mécanique, les massifs karstiques posent des problèmes d’instabilités sous la forme d’effondrements de cavités ou de déstabilisation de falaises rocheuses. D’un point de vue descriptif, la littérature est abondante sur ces sujets. Mais l’analyse de ces instabilités s’avère malaisée en pratique devant la variété des situations rencontrées et la difficulté que présente la détection des cavités. Comme dans les massifs rocheux, les ruptures progressives s’expliquent par l’altération et la dégradation des propriétés physiques et mécaniques de la roche en lien avec les variations de température et d’humidité (Santo et al., 2007 ; Parise et Lollino, 2011 ; Parise et al., 2018 ; parmi d’autres). Les ruptures locales participent à l’élargissement progressif des cavités et leur déstabilisation.

2.6 Température des cours d’eau

La température des cours d’eau est un sujet important qui a fait l’objet de nombreux travaux (Cassie, 2006). Elle dépend d’une multitude de facteurs parmi les conditions d’alimentation, les facteurs météorologiques, les propriétés du bassin versant et des terrains, les caractéristiques hydrauliques du lit, les modalités d’échanges avec les nappes, etc. Globalement, la température de l’eau suit de plus ou moins près la température atmosphérique dans ses variations saisonnières, voire ses variations diurnes. Parmi les questions se pose celle de l’influence des précipitations et des crues sur la température de l’eau. Cet effet est avéré depuis longtemps (Kobayashi et al., 1999), mais son étude expérimentale est récente (Brown et Hannah, 2007 ; Subehi et al., 2010a, b ; Hayashi et al., 2013 ; Zeiger et Hubbart, 2015 ; parmi d’autres). Là aussi de nombreux facteurs interviennent et les situations sont diverses. Suivant le site, les conditions du moment et les précipitations, la température de l’eau dans le cours d’eau augmente, ou diminue ou ne change pas pendant la crue. Brown et Hannah (2007) rapportent les données enregistrées sur trois cours d’eau, qui montrent qu’une relation apparaît entre la chute de température de l’eau et l’amplitude de la précipitation, son intensité et le pic de débit. Dans d’autres situations, après un épisode de précipitations en saison estivale par exemple, le drainage des eaux pluviales à partir des surfaces imperméables chaudes du bassin versant a pour effet d’élever la température du cours d’eau. Mais cet effet est estompé par la baisse consécutive de la température atmosphérique dont le régime est modifié au-dessus du bassin pendant cet épisode (Subehi et Fakhrudin, 2011). Ainsi, la prévision de telles réponses demeure encore problématique et la multiplication des données expérimentales reste d’actualité.

3 Site, historique, environnement

3.1 Le site du Pont du Gard

Le Pont du Gard est un pont-aqueduc romain construit vers 50 après JC pour assurer le franchissement des gorges du Gardon par l’aqueduc d’alimentation de la ville de Nîmes depuis la source d’Eure à Uzès. Cet ensemble d’ouvrages de 50 km de longueur, leur construction et leur usage font l’objet d’une documentation importante dans la littérature (Fiches et Paillet, 1989 ; Fabre et al., 1991 ; Paillet, 2005 ; parmi d’autres). Les gorges du Gardon constituent une incision profonde et sinueuse au cœur du plateau des Garrigues au nord de Nîmes. Ce plateau est constitué par des calcaires Barrémien à faciès urgonien (Crétacé Inférieur) blancs, très durs, résistants et karstifiés. Le réseau karstique fossile affecte de façon plus ou moins homogène et continu l’ensemble de ces formations calcaires et donne lieu à des circulations d’eau de grande ampleur, pour un niveau de base général qui pourrait se situer non loin du Pont du Gard (Pialot, 2013). Le débit du Gardon présente des fluctuations saisonnières typiques du régime cévenol, avec des hautes eaux d’automne essentiellement et des crues qui peuvent être très soudaines et violentes, comme celle du 30 septembre 1958 et celle du 8 septembre 2002. Enfin, en parcourant son canyon, le lit du Gardon est jalonné de pertes qui alimentent l’aquifère urgonien et de résurgences qui les restituent au cours d’eau.

Pour son franchissement du Gardon, le pont-aqueduc du Pont du Gard s’appuie sur les calcaires urgoniens lités en gros bancs et légèrement pentés vers le NE. Cet entablement subhorizontal constitue le lit majeur du Gardon et se trouve inondé pendant les crues. Le lit mineur permanent, de direction SW-NE, constitue un goulet profond (chenal). Il est enjambé par l’arche portée par les piles VII en rive droite et VIII en rive gauche, de 24,5 m d’ouverture (Fig. 1). Cette incision de direction N040 constitue un couloir fracturé majeur, qui, avec d’autres, coïncident avec la direction des grandes failles régionales du secteur. La dalle massive qui constitue l’entablement est continue sur sa rive droite et laisse apparaître des cavités karstiques. Puis, en s’approchant du lit mineur, elle est traversée par de nombreuses discontinuités subparallèles aux flancs du goulet, pour former une zone de broyage ancienne apparemment bien cimentée (calcite), sans indices de mouvements récents (Goguel, 1965).

L’analyse de la fracturation du substratum de la pile VII montre de nombreux indices de l’activité tectonique ancienne, dont les traces témoignent localement d’une intensification de la fracturation, qui peut aller jusqu’à la bréchification complète des calcaires (Lopez et al., 2007). Il existe un lien entre la fracturation du massif et sa structure karstique. Les formes de dissolution s’accentuent en s’approchant du chenal, sur les parois duquel apparaissent des cavités de taille pluri-décimétriques à pluri-métriques. Divers indices montrent que le creusement du canyon et d’une partie des cavités karstiques est antérieur à la transgression miocène (−23 Ma). L’analyse confirme que le tracé du chenal coïncide avec un couloir de fracturation tectonique intensément bréchifié et karstifié, puis incisé par le cours d’eau, et qui se prolonge vraisemblablement en profondeur. Le fond du goulet est recouvert par des alluvions grossières constituées de roches cristallines. Leur épaisseur dépend des crues qui les ont déposées.

Sur la rive gauche du chenal, qui soutient la pile VIII, le massif urgonien paraît moins fracturé, tout en conservant son caractère karstifié. Le rebord du massif rocheux montre néanmoins la trace d’une discontinuité N040 marquée, dont la présence explique sans doute le choix des constructeurs de porter l’ouverture de l’arche à 24,5 m (contre 19,2 m pour les autres travées). La distance entre ce rebord de la rive gauche et le pointement rocheux où se fonde la pile VII marque néanmoins la plus petite largeur du chenal. Le pont-aqueduc et le pont routier qui le borde en aval (pont Pitot, construit au XVIIIe) sont édifiés à l’aide d’un calcaire coquillier miocène (molasse) extrait d’une carrière proche. La charge verticale apportée par la pile VII commune aux deux ouvrages est estimée à 82,9 MN.

thumbnail Fig. 1

Profil schématique du massif rocheux sous les fondations des piles VI, VII et VIII du Pont du Gard. Principe du renforcement par boulonnage. Les directions de deux principales familles de discontinuités sont indiquées en rouge. Vue de l’amont vers l’aval.

Schematic profile of the rock mass under the foundations of piers VI, VII and VIII. Principe of reinforcement by bolting. The direction of the two main families of discontinuities are indicated in red. View from upstream to downstream.

3.2 Historique des travaux

L’identification des problèmes posés par les massifs rocheux de fondation des piles VII et VIII du Pont du Gard a émergé progressivement à la faveur des investigations subaquatiques opérées depuis les années 1930 dans le site. Des cavités ont été découvertes sur les flancs du goulet qui constitue le lit mineur. Ces cavités forment des surplombs plus ou moins accentués, sous la pile VII tout particulièrement. Mais d’autres cavités plus réduites pénètrent au sein du massif calcaire sur plusieurs mètres, ce qui rappelle les formes karstiques observées à différentes échelles dans le massif urgonien aux environs du site. Ainsi, une première hypothèse a consisté à évoquer un affaiblissement possible du massif par dissolution de la roche et progression de l’activité karstique. Une autre hypothèse a évoqué l’usure mécanique de la roche par le transport solide du Gardon pendant les crues, sur le périmètre mouillé du chenal.

Ces craintes ont motivé les travaux de protection des massifs rocheux, prévus dès 1938 et réalisés en 1949, pour lutter contre l’érosion du Gardon considérée alors comme le principal agent de dégradation du massif. Après sélection parmi plusieurs solutions techniques, cette protection était constituée par un parement de sacs en béton empilés et jointifs jouant le rôle de batardeau et un remplissage jusqu’à la paroi rocheuse par du béton coulé sous l’eau à la goulotte. La mise en place de ces éléments a été effectuée par des scaphandriers après un dragage partiel du fond alluvionnaire. Très vite, la protection des flancs du chenal a été endommagée par les crues du Gardon et celle de 1958 en particulier. Néanmoins, il subsiste encore aujourd’hui des lambeaux de ces parements liés aux parois rocheuses. Cette dégradation s’explique principalement par le déchaussement des appuis du batardeau posés sur le fond alluvionnaire mobile pendant les crues.

Le projet de 1938 a donné le coup d’envoi des reconnaissances effectuées dans le site. Ces reconnaissances concernent les abords des piles VII et VIII et le chenal dans lequel règnent plus de dix mètres d’eau à l’étiage. Les investigations dans le chenal s’effectuent donc en milieu aquatique, ce qui nécessite de mettre en œuvre des moyens spécifiques à partir d’une barge et appliquer les bonnes pratiques de réalisation des travaux en rivière. Ces investigations, comme les reconnaissances à partir des rives et les travaux, appellent à adopter des dispositions strictes pour respecter les règles de conservation de ce site classé et les règles environnementales qui s’y appliquent.

Ces investigations comptent des visites subaquatiques d’inspection des parois rocheuses et des cavités karstiques connues et visibles en paroi. Elles concernent aussi l’inspection des renforcements (voir plus bas). Ces visites sont accompagnées par des levés bathymétriques du fond alluvionnaire. Des levés de profils des parois rocheuses ont été effectués dans le passé. Mais, faute de précision, les techniques employées n’ont pas permis d’observer une évolution des parois, sauf la disparition d’éléments des protections de 1949 et l’affouillement des graviers au fond du lit du Gardon. D’après ces investigations, aucune observation ne décrit la disparition de fragments rocheux en paroi.

Les reconnaissances en rivières ont été organisées en trois campagnes de sondages dans le cadre des études de renforcement des fondations rocheuses des piles VII et VIII. Les sondages avaient pour objectif d’évaluer l’épaisseur des alluvions et de détecter le toit du substratum rocheux. Les campagnes ont eu lieu en 1964, 1966 et 2005, pour aboutir à la réalisation d’une vingtaine de sondages destructifs au total et deux sondages carottés en rive. Diverses propositions d’application d’autres types de méthodes de reconnaissances n’ont pas abouti devant la difficulté que présente leur mise en œuvre dans ce site rocheux (chenal encaissé profond et présence d’alluvions grossières).

Des projets de renforcement des massifs de fondation des piles VII et VIII ont été envisagés dans les années 1960, pour aboutir au renforcement par boulonnage réalisé en 1981. Sur la base des données structurales disponibles et en plus du risque d’effondrement de cavités karstiques, deux mécanismes de rupture des flancs rocheux du chenal ont été envisagés, en lien avec la configuration structurale du massif. Le premier mécanisme est un cisaillement vers le chenal et sur une surface inclinée d’un prisme portant une pile. Le second mécanisme est un basculement (fauchage) d’un bloc rocheux délimité à l’arrière par une discontinuité N040 subparallèle au flanc du goulet et sur sa base par un joint de stratification. Des combinaisons de ces mécanismes sont envisagées aussi.

La solution de renforcement par boulonnage a été choisie parmi plusieurs variantes. Elle a consisté à sceller trois lits de neuf boulons rayonnants sous des fondations à partir de la rive (Fig. 1). Les forages inclinés sont effectués en mode destructif avec enregistrement des paramètres d’avancement de l’outil pour repérer les discontinuités et les cavités dans la roche avant la pose du boulon. Les boulons sont des barres d’acier à très haute limite élastique de 38 mm de diamètre. Ils débouchent en rivière et sont boulonnés à leurs deux extrémités, légèrement prétendus, puis scellés au coulis dans une gaine en géotextile. Des consignes strictes de mise en œuvre des forages et des scellements sont appliquées pour garantir la qualité du boulonnage, ne pas colmater le réseau karstique, éviter des pertes de fluides vers le Gardon et respecter des critères prédéfinis (volumes injectés et pressions du coulis).

Les reconnaissances subaquatiques effectuées après la crue du Gardon de septembre 2002 ont révélé un abaissement du toit des alluvions. Un nouveau niveau karstique a été découvert en profondeur sous la pile VII formant un chapelet de cavités alignées sur un plan de stratification. Par comparaison avec les forages anciens, les forages de la campagne de 2005 réalisés en rivière ont montré un abaissement du fond rocheux en plusieurs points proches du flanc droit du chenal, avec pour conséquence d’augmenter la hauteur libre de ce rebord du massif sous la pile VII. Un complément du dispositif de renforcement de 1981 a été envisagé alors sous cette pile, constitué par une ligne de douze boulons inclinés et plus profonds (Fig. 1). Les travaux ont été réalisés en 2008 en employant une méthodologie dérivée de celle de 1981. Ces dispositions n’ont pas été appliquées sous la pile VIII.

Ces travaux ont donné l’occasion de mettre en place un dispositif d’auscultation du massif calcaire sous la pile VII à titre expérimental. Ce dispositif est constitué par deux boulons inclinés, instrumentés et scellés en forage, qui s’inscrivent dans un faisceau de boulons de 1981 à l’aplomb du pont-aqueduc (Fig. 2). Chaque boulon instrumenté est composé par quatre extensomètres. Ce dispositif sera décrit au paragraphe 4. Les résultats de cette auscultation, qui ont été recueillis pendant la période 2009–2017, et leur interprétation font l’objet des paragraphes suivants.

thumbnail Fig. 2

Principe de l’implantation des deux boulons instrumentés B25 et B35 sous la fondation de la pile VII.

Principle of the implantation of the two intstrumented bolts B25 and B35.

3.3 Données environnementales du site

Ces données environnementales du site concernent essentiellement les températures atmosphériques et les crues du Gardon. Ces données proviennent de différentes origines.

3.3.1 Températures mesurées pendant l’auscultation

Pour commencer, le graphique de la figure 3 montre les températures enregistrées sur le site dans le cadre de l’auscultation et pendant la période qui va de novembre 2013 à mai 2017 (en rouge).

L’enregistrement est effectué à l’aide d’une sonde située dans le boîtier de mesure qui est incrusté dans la roche en surface du massif. Les mesures sont enregistrées au pas de quatre heures. L’enregistrement a été mis en défaut pendant plusieurs périodes, en particulier jusqu’en 2013, en lien avec des disfonctionnements du boîtier de mesure ou des pannes d’alimentation électrique interne.

Le graphique de la figure 3 montre une évolution saisonnière des températures dans ce boîtier de mesure. Il montre aussi des fluctuations importantes de la température en cours de journée. Ces variations dépendent de l’évolution de la température atmosphérique. Elles dépendent aussi de l’ensoleillement et de l’ombre portée produite par les arches du pont-aqueduc sur le coffret de mesure, quand celui-ci n’est pas submergé par une crue du Gardon. A contrario, les parois du boîtier étanche constituent des écrans thermiques, qui ont pour effet de réduire les amplitudes journalières extrêmes.

thumbnail Fig. 3

Enregistrements de la température dans le boîtier de mesure, températures moyennes mensuelles min et max à Vers Pont du Gard, températures des eaux du Gardon et occurrences des crues du Gardon (débits supérieurs à 50 m3/s). Période de novembre 2013 à mai 2017.

Temperature records in the measuring box, average monthly temperatures min and max in Vers Pont du Gard, Gardon water temperatures and occurrence of Gardon floods (flow rate higher than 50 m3/s). Period from November 2013 to May 2017.

3.3.2 Température atmosphérique à Vers Pont du Gard

Au-delà de ces fluctuations, une tendance générale se dessine qui montre un cycle annuel de variations à l’échelle des huit années d’auscultation. Afin de confirmer cette évolution, les mesures des températures moyennes mensuelles enregistrées à Vers Pont du Gard ont été téléchargées à partir du site http://www.linternaute.com/voyage/climat/vers-pont-du-gard pour la période de janvier 2009 à mai 2018. Ces températures sont représentées en bleu sur la figure 3 avec les enregistrements de la température dans le boîtier, en rouge. La température moyenne est de 22,9 °C en juillet, qui est le mois le plus chaud de l’année. La température moyenne est de 5,2 °C au mois de janvier, qui est le mois le plus froid de l’année. La comparaison des courbes montre qu’en moyenne et en dehors des fluctuations journalières, la température dans le boîtier de mesure suit les variations saisonnières. Seules, des pointes maximales dépassent les moyennes mensuelles en été.

3.3.3 Températures des eaux du Gardon

Les mesures des températures des eaux du Gardon ont été téléchargées à partir de la base Naïades qui rassemble des données concernant la qualité des eaux de surface en France (EauFrance, 2019 ; http://www.naiades.eaufrance.fr). Les mesures proviennent de différentes stations situées le long des Gardons. Un premier jeu de données rassemble les mesures de température qui accompagnent les analyses physico-chimiques réalisées dans trois stations depuis mai 2016 (stations de Tornac, St Chaptes et Remoulins ; une mesure par mois environ). Discrètes dans le temps, ces mesures sont représentées par des figurés sur la figure 3. Le second jeu de données rassemble les enregistrements réalisés au pas d’une heure entre les 09/04/2016 et 12/10/2016, puis entre les 08/03/2017 et 02/11/2017 à la station de Remoulins. Elles couvrent deux périodes estivales en 2016 et 2017. Elles sont représentées en vert sur la figure 3.

Les périodes de recouvrement des différentes sources de mesures de la température de l’eau sont courtes, ce qui rend difficile la comparaison de ces données. Des écarts apparaissent entre les températures mesurées « en continu » et les températures « discrètes ». Ces écarts proviennent vraisemblablement du fait que les points de prélèvements et de mesures ne coïncident pas strictement. Néanmoins, sauf pendant l’été 2016, toutes ces mesures sont en accord entre elles et elles s’inscrivent dans le fuseau des températures atmosphériques moyennes à Vers Pont du Gard (en bleu). Elles marquent clairement les saisons avec une amplitude de l’ordre de 10 °C. La comparaison des mesures « discrètes » provenant des trois stations montre des variations saisonnières plus amorties à Remoulins, la station située en aval (les valeurs extrêmes y sont moins élevées). Les températures enregistrées dans le boîtier de mesure sont plus fortes en été (en rouge). Les fluctuations journalières sont plus faibles dans l’eau (en vert).

3.3.4 Crues du Gardon

Les dates d’occurrence des crues du Gardon ont été recueillies auprès de la Banque Hydro (EauFrance, 2018 ; http://www.hydro.eaufrance.fr) à partir de deux stations de mesures hydrométriques situées en aval du site et qui sont : 1) Le Gardon (Les Gardons réunis) à Remoulins [Pont neuf] ; 2) Le Gardon (Les Gardons réunis) à Remoulins [Etiage (CNR)]. Il s’agit des crues dont le débit journalier maximum est proche ou supérieur à 50 m3/s, parmi les évènements répertoriés. Les plus fortes crues sont observées en automne et en hiver le plus souvent. Les débits maximums ont été enregistrés les 04-05-06/11/2011 et 10-11/10/2014 (plus de 800 m3/s). Les crues sont repérées par des traits verticaux sur les graphiques de la figure 3. Quelques-unes sont numérotées de 1 à 9 et elles sont repérées sur les graphiques et dans le tableau 1.

Les données disponibles offrent peu de recouvrements entre les mesures continues des températures des eaux du Gardon et l’occurrence des crues. La comparaison semble néanmoins indiquer quelques évènements où les crues s’accompagnent d’une baisse de la température de l’eau. Néanmoins, sans données météorologiques supplémentaires et une analyse précise, il est difficile de conclure sur ce point.

Tableau 1

Dates d’occurrence de quelques crues du Gardon et débits journaliers maximum à Remoulins. D’après la Banque Hydro (EauFrance, 2019).

Dates of occurrence of some Gardon floods and maximum daily flows at Remoulins.

4 Dispositif d’auscultation extensométrique

Ce paragraphe présente les caractéristiques du dispositif d’auscultation extensométrique mis en place au sein du massif de fondation de la pile VII du Pont du Gard.

4.1 Matériel

Le matériel est constitué par deux boulons instrumentés, dénommé B25 et B35, et une centrale de mesure. Chacun des boulons est composé par un assemblage de quatre capteurs extensométriques à cordes vibrantes reliés par des tronçons de barre en acier. La longueur de ces tronçons est choisie afin de répartir les capteurs selon un plan préétabli pour former un ensemble continu équivalent à un boulon d’ancrage.

La figure 4a montre les capteurs extensométriques qui ont été installés sur le site, avant assemblage. La figure 4b montre l’assemblage d’un capteur avec des tronçons de barres au moyen de manchons en acier (barres de 28 mm de diamètre). Le capteur est inséré dans un centreur (distanceur à corbeille). La photo montre aussi les câbles de liaison des capteurs (bleu) et une canule d’injection des coulis de scellement (noir). Les capteurs sont répartis selon un intervalle de 2,5 m à partir de la tête. Un dernier élément de barre de 0,5 m termine le dispositif, dont la longueur totale est de 11 m. Les deux boulons instrumentés B25 et B35 ont été installés dans leur forage le 15/04/2008.

La centrale de mesure a été mise en place sur le site de la pile VII en 2009 (première mesure le 17/07/2009). Les huit cordes vibrantes des boulons instrumentés et une sonde de température ont été connectées à la centrale en vue d’enregistrer les données en continu dans le temps au pas de 4 heures (6 mesures par jours). La centrale d’acquisition est implantée dans un coffret étanche incrusté dans la roche non loin des têtes des deux boulons instrumentés B25 et B35, sous le pont-aqueduc.

thumbnail Fig. 4

Vues du dispositif instrumental. (a) Deux capteurs extensométriques avant leur assemblage ; (b) Un capteur installé dans un centreur et assemblé avec deux tronçons de barre au moyen de manchons (diamètre 28 mm). Photos Soldata.

View of experimental device. (a) Two extensometric sensors before their assembly; (b) A sensor put in a spacer and piled up with two pieces of bar by means of couplers.

4.2 Mise en place des boulons instrumentés

Les deux boulons instrumentés B25 et B35 sont disposés dans la fondation rocheuse de la pile VII du pont-aqueduc. Ils s’insèrent dans le dispositif de boulonnage de 1981 (Figs. 1 et 2). Ils sont inclinés vers le Gardon à 25° et 35° par rapport à l’horizontale et leur tête affleure en surface du massif rocheux. Deux forages ont été exécutés au préalable sur une longueur de principe égale à 11,5 m et un diamètre de 165 mm (les 27/03 et 31/03/2008). La foration est réalisée à l’air comprimé au marteau fond de trou, comme les forages des boulons du renforcement de 2008.

Un enregistrement des paramètres de foration est effectué (vitesse instantanée d’avancement de l’outil, poussée sur l’outil, couple de rotation exercé sur l’outil). Au-delà des deux premiers mètres des forages, les diagrammes des vitesses instantanées d’avancement montrent une progression régulière de l’outil, de l’ordre de 20 m/heure, entrecoupée de sauts de vitesse rapide qui témoignent de la traversée de discontinuité ou de petites cavités karstiques (Fig. 5). Les vitesses moyennes sont plus rapides et dispersées sur les deux premiers mètres des forages, dans une région plus discontinue du massif près de la surface.

Un examen endoscopique est effectué alors par imagerie optique des parois des forages à l’aide d’une sonde équipée d’une caméra numérique à haute résolution. Il est possible alors de détecter diverses figures lithologiques et structurales particulières sur les parois du forage et, notamment, les discontinuités rocheuses traversantes dont les traces peuvent être orientées. L’interprétation stéréographique de ces données structurales confirme la présence des deux familles principales de discontinuités caractéristiques du site, avec la stratification qui est subhorizontale et la famille des discontinuités N040 (Fig. 1).

Les diagrammes des vitesses instantanées d’avancement de l’outil de forage et les images des parois des forages B25 et B35 montrent que les capteurs sont implantés dans des régions de faibles vitesses, c’est à dire dans des passages rocheux, sauf le capteur n° 2 situé à 7,5 m dans le forage B35, où le diagramme des vitesses indique la présence de discontinuités ouvertes ou de cavités karstiques. Les deux capteurs n° 1 situés à 10 m dans les forages B25 et B35 sont scellés immédiatement après le franchissement d’une cavité.

L’assemblage des boulons instrumentés consiste à relier les capteurs extensométriques et les tronçons de barre en acier au moyen de manchons (Fig. 4). Les capteurs sont insérés dans des centreurs. Après assemblage, les câbles de mesure sont ligaturés à la barre. Une gaine protège le faisceau de câble en tête. Le boulon instrumenté est équipé de canules d’injection et d’évent, puis il est enveloppé dans une gaine textile (chaussette), qui est ligaturée à son tour. Cette gaine est séparée en trois secteurs successifs de 3,25, 5 et 3,25 m de longueur. Chaque secteur est équipé d’un séparateur injectable muni de sa canule d’injection.

Le boulon instrumenté est mis en place dans son forage. Le scellement est réalisé au moyen d’un coulis de ciment pur (ciment CEM III/B, dosage dans le rapport massique ciment sur eau C/E = 2). L’injection du coulis est effectuée à débit lent, secteur par secteur, en commençant par le plus bas. Le critère d’arrêt est défini en volume maximal unitaire par mètre de trou, afin de respecter les conditions environnementales de protection des eaux du Gardon (garantie de limitation des pertes de coulis éventuelles en rivière). Ces volumes sont définis par secteur du forage en fonction de la qualité de la roche, qui est déduite des enregistrements des paramètres de forage (30 l/m dans la roche saine, 40 l/m dans les passages altérés et 50 l/m en présence de vides, sachant que l’espace annulaire entre le boulon et la paroi du forage représente un volume théorique de 20 l/m). Si le critère en volume unitaire n’est pas atteint, la pression d’injection est limitée à 300 kPa. La pression est maintenue pendant cinq minutes pour accompagner l’essorage du coulis. Puis, la canule d’injection est fermée. L’opération est renouvelée ainsi dans les deux secteurs suivants en appliquant les mêmes critères de volume et de pression.

Les scellements des boulons instrumentés B25 et B35 ont été réalisés le 15/04/2008. Les fiches de suivi du scellement font état des volumes de coulis injectés égaux à 480 et 490 l respectivement (pour des volumes prévisionnels de 510 et de 520 l). Il n’y a pas résurgence du coulis en tête du boulon B25 et les pressions résiduelles sont faibles dans les deux séparateurs du haut (20 kPa). Par contre, il y a résurgence du coulis en tête du boulon B35, et comme dans le séparateur du bas du boulon B25, les trois séparateurs du boulon B35 ont été injectés sous la pression de 300 kPa pour aboutir enfin à des pressions résiduelles supérieures à 100 kPa.

Le contrôle de la réponse des capteurs extensométriques est effectué à chaque étape du processus de mise en place du boulon instrumenté et de son scellement. Il faut noter enfin que les capteurs extensométriques n° 1, 2 et 3 se trouvent sous le niveau du Gardon à l’étiage (Fig. 2).

thumbnail Fig. 5

Enregistrements des vitesses de foration (VIA) et position des capteurs extensométriques (points rouges) dans les forages. (a) Forage B25 ; (b) Forage B35.

Drill rate logging (ROP) and positions of sensors in the borholes. (a) Borehole B25; (b) Borehole B35.

4.3 Condition de l’auscultation

La centrale d’acquisition a été mise en place sur le site en 2009, pour un enregistrement des huit capteurs à corde vibrante (quatre capteurs par boulon instrumenté B25 et B35) et la température dans le boîtier de mesure. L’enregistrement des mesures est effectué au pas de quatre heures (six mesures par jour). Les mesures sont stockées temporairement. Puis ces données doivent être extraites de la centrale et copiées sur un support informatique pour être transférées au laboratoire où elles sont exploitées. Cette opération doit être répétée une fois par trimestre, afin que la mémoire de la centrale d’acquisition n’arrive pas à saturation. Dans le même temps, le rechargement des batteries électriques doit être effectué.

Après la mise en route de l’auscultation en juillet 2009, des disfonctionnements ont été constatés rapidement. L’insuffisance de la capacité de la batterie électrique d’alimentation interne de la centrale s’est manifestée prématurément. Une batterie additionnelle externe a été mise en place par la suite. Dans le même temps, le boîtier s’est révélé insuffisamment étanche et a été envahi par l’eau à l’occasion des épisodes de crue du Gardon.

La centrale a fait l’objet d’une réparation. Des interventions ont été rendues nécessaires sur le site pour réparer ou améliorer les conditions de fonctionnement du dispositif d’auscultation. Mais, dans les périodes de disfonctionnement ou de panne de l’alimentation électrique interne, des données ont été perdues. Des données disponibles ont été enregistrées depuis le 17/07/2009. Le dernier enregistrement date du 24/05/2017. Les principales périodes manquantes se trouvent en 2011, 2012 et 2013. Quatre cycles annuels à peu près continus ont été enregistrés de 2014 à 2017.

5 Résultats de l’auscultation extensométrique

5.1 Evolution des mesures extensométriques en fonction du temps

5.1.1 Variations saisonnières

Les figures 6a et 6b montrent les microdéformations mesurées par les quatre capteurs à corde vibrante de chacun des boulons instrumentés B25 et B35 en fonction du temps, entre novembre 2013 et mai 2017. Les enregistrements couvrent les quatre cycles annuels. Dans chaque boulon, le capteur n° 1 est situé en bout de barre, c’est à dire à proximité de la paroi subverticale du massif rocheux côté Gardon (courbes représentées en rouge sur les graphiques), tandis que le capteur n° 4 est disposé à 2,5 m de la tête du boulon, c’est à dire à faible profondeur sous la surface du terrain naturel et au-dessus du niveau du Gardon à l’étiage (courbes représentées en bleu sur les graphiques). Les raies qui marquent l’occurrence des crues sont indiquées sur les graphiques (débits moyens journaliers supérieurs à 50 m3/s). Quelques crues sont repérées par les numéros 1 à 9 (Tab. 1).

Les réponses des deux boulons instrumentés sont comparables entre elles et se trouvent en forte corrélation avec les variations de température (Fig. 3), sous la forme d’une contraction en hiver, comptée négativement ici, et une dilatation en été, comptée positivement. Pour la plupart des capteurs, ces mesures extensométriques varient dans une bande de 100 μdéf environ (double amplitude). L’amplitude des déformations diminue légèrement en allant de la tête du boulon instrumenté B25 vers son extrémité (du capteur n° 4 au capteur n° 1). Cela est vrai aussi pour les trois capteurs n° 1, 3 et 4 du boulon B35, contrairement au capteur n° 2 (courbe verte, Fig. 6b). L’amplitude des variations de ce dernier est plus grande et sa réponse diverge progressivement par rapport aux trois autres. Une explication peut être trouvée dans la position particulière de ce capteur vis à vis des particularités structurales du massif rocheux à 7,5 m (Fig. 5). Néanmoins, les mesures extensométriques issues des différents capteurs ne montrent pas un effet marqué de la profondeur dans le massif.

De leur côté, les mesures du capteur n° 4 du boulon instrumenté B35, qui est situé à 2,5 m de profondeur, montrent des signes de divergence à partir de 2014 (courbe bleue, Fig. 6b). En 2016, cet accroissement de la dilatation serait globalement de −20 à −30 μdéf environ, soit près d’un quart à un tiers de la largeur de la bande de 100 μdéf évoquée ci-dessus. Cette tendance ne se corrèle pas avec les mesures des sept autres capteurs et ne trouve pas d’explication pour l’heure.

thumbnail Fig. 6

Auscultation dans la période de novembre 2013 à mai 2017. Réponses des capteurs à corde vibrante. (a) Boulon instrumenté B25 ; (b) Boulon instrumenté B35.

Monitoring in the period from November 2013 to May 2017. Sensors responses. (a) Instrumented bolt B25; (b) Instrumented bolt B35.

5.1.2 Variations journalières

L’examen des enregistrements montre aussi que des petites variations journalières ou hebdomadaires sont indiquées par les réponses des capteurs n° 4 (courbes bleues) et, moins désordonnées, par les capteurs n° 1 (courbes rouges), figures 6a et 6b. Au contraire les réponses des capteurs n° 2 et 3, qui sont situés dans la partie centrale des boulons instrumentés, sont lisses et témoignent essentiellement des variations saisonnières (courbes vertes et mauves).

Ces petites variations confirment l’influence de la température sur les réponses enregistrées, qui s’observe à l’échelle des variations saisonnières. Ainsi, à court terme, les variations de la température extérieure se font sentir d’abord à proximité des limites du massif rocheux :

  • sous l’effet des conditions atmosphériques imposées à la surface du terrain naturel pour les capteurs n° 4 (courbes bleues) ;

  • et des conditions imposées par l’eau du Gardon le long de la paroi rocheuse subverticale qui borde le lit mineur pour les capteurs n° 1 (courbes rouges).

Ces petites fluctuations de température ne se propagent pas profondément dans la roche. Les réponses des capteurs n° 2 et 3 apparaissent légèrement retardées en comparaison des capteurs n° 1 et 4 (Figs. 6a et 6b). Comme dans tous les massifs rocheux, la pénétration de la température dans la roche est progressive et lente.

Cette interprétation met en avant l’effet de la température atmosphérique sur les déformations du massif rocheux. Elle ignore la présence des ouvrages qui interviennent au droit de la pile VII par leur poids et leurs déformations d’origine thermique.

5.2 Influence des crues du Gardon

L’examen de la figure 6 fait apparaître des petites variations des déformations extensométriques qui coïncident avec l’occurrence des crues du Gardon, en particulier parmi les crues numérotées de 1 à 9. Cela concerne les mesures extensométriques réalisées à proximité de la paroi rocheuse du Gardon, avec les capteurs n° 1 (rouge) et n° 2 (vert) des boulons instrumentés B25 et B35, alors que les capteurs n° 3 (mauve) et n° 4 (bleu) semblent insensibles ou peu sensibles à ces évènements. De telles variations apparaissent essentiellement en automne et en hiver. Elles indiquent une contraction du massif rocheux. Les amplitudes de ces microdéformations ne semblent pas liées proportionnellement aux débits des crues (voir le Tab. 1). Une hypothèse a été avancée qui explique ces contractions par un apport d’eau froide par le Gardon en période de crue. Avec la présence de discontinuités et des petites cavités karstiques, la porosité du massif pourrait jouer en faveur d’un tel scénario.

Les graphiques des figures 7 et 8 montrent les mesures de la température et des microdéformations qui ont été enregistrées pendant la période hivernale de six mois allant de septembre 2016 à février 2017. Les évènements tels que la crue n° 9 (Figs. 8a et 8b) et d’autres se traduisent par une contraction de la roche. Cette dernière (du 23/11/2016) fait apparaître une signature typique de l’effet d’une crue avec les réponses des capteurs n° 1 (rouge) et n° 2 (vert). Une contraction brutale se produit avec l’arrivée du pic de crue. Puis la microdéformation se stabilise ou s’inverse jusqu’à reprendre un régime en rapport avec la variation saisonnière. Sur ces mêmes graphiques, un événement postérieur à l’évènement n° 9 (le 29/01/2017) montre une réponse semblable, alors que la contraction saisonnière passe par son minimum. Un événement antérieur à l’évènement n° 9 (le 15/10/2016) se manifeste furtivement sur le boulon B35 et non pas sur le boulon B25.

D’autres fluctuations des microdéformations apparaissent en l’absence de crue. Les crues de printemps sont rares et ne montrent pas une signature semblable à celles des crues d’automne ou d’hiver. Enfin, les microdéformations qui coïncident avec les crues du Gardon proviennent essentiellement des capteurs n° 1 (rouge) des deux boulons instrumentés B25 et B35 et, dans une moindre mesure, des capteurs n° 2 (vert). Un amortissement et un déphasage semblent se dessiner en progressant de la paroi du Gardon vers le massif rocheux. Si les crues du Gardon se manifestaient d’abord par une action mécanique sur le massif de la pile VII, tous les capteurs devraient réagir simultanément.

Or, seuls les deux capteurs les plus proches de la paroi latérale du massif (rouge) et les deux suivants (vert) réagissent et manifestent un effet de gradient. Ainsi, l’effet de la température paraît prédominant, en admettant que certaines crues du Gardon sont porteuses d’une sollicitation thermique différente des conditions atmosphériques du moment.

thumbnail Fig. 7

Auscultation dans la période de septembre 2016 à février 2017. Enregistrement de la température dans le boîtier de mesure, températures moyennes mensuelles min et max à Vers Pont du Gard et occurrences des crues du Gardon (débits supérieurs à 50 m3/s).

Monitoring in the period from November 2013 to May 2017. Temperature records in the measuring box, average monthly temperatures min and max in Vers Pont du Gard, Gardon water temperatures and occurrence of Gardon floods (flow rate higher than 50 m3/s).

thumbnail Fig. 8

Auscultation dans la période de septembre 2016 à février 2017. Réponses des capteurs à corde vibrante. (a) Boulon instrumenté B25 ; (b) Boulon instrumenté B35.

Monitoring in the period from September 2016 to February 2017. Sensors responses. (a) Instrumented bolt B25; (b) Instrumented bolt B35.

5.3 Variations des mesures extensométriques en fonction de la température

La figure 9 montre les variations des mesures extensométriques (en abscisse) avec la température (en ordonnée) le long du boulon instrumenté B25 pendant un cycle annuel. Ce cycle est partagé en une période automne-hiver du 09/10/2014 au 25/02/2015 et une période printemps-été du 25/02/2015 au 01/09/2015. Cette représentation permet d’exprimer la sollicitation (la température) en fonction de la réponse (les microdéformations extensométriques), par analogie avec des courbes contraintes-déformations qui sont observées pendant des cycles de chargement-déchargement mécaniques.

Ces courbes prennent l’allure d’une boucle d’hystérésis plus ou moins ouverte, qui montre que la réponse est retardée par rapport à la sollicitation (voir le sens de parcours des boucles indiqué par les flèches). La comparaison des périodes automne-hiver (couleurs sombres) et des périodes printemps-été (couleurs claires) montre que les fluctuations de la température sont plus prononcées en été qu’en hiver. Par contre, des petits épisodes de déformation apparaissent sur les mesures extensométriques des capteurs n° 1 (à 10 m de la surface, en rouge) pendant la période automne-hiver, qui correspondent aux crues du Gardon le plus souvent. De tels évènements ne s’observent pas pendant la période printemps-été où l’effet des crues du Gardon n’est pas prononcé.

Le tableau 2 indique les pentes moyennes des boucles donnant les microdéformations en fonction de la température pour les deux boulons instrumentées. Ces pentes sont les inverses des pentes moyennes des boucles représentées sur la figure 9. Sauf celle du capteur n° 2 du boulon B35 (dont la réponse s’écarte de celles des sept autres capteurs, Fig. 6b), les pentes sont à peu près égales. Elles valent en moyenne 4,7 10−6 /°C, ce qui les placent dans les ordres de grandeur habituels des coefficients de dilatation thermique des roches.

Pour compléter la présentation des résultats de l’auscultation, les mesures extensométriques des capteurs n° 1, 2 et 4 sont représentées en fonction des mesures du capteur n °3 situé à 5 m de la tête du boulon instrumenté B25 sur la figure 10. Ce choix d’adopter ce capteur comme référence se justifie par sa position qui est la plus éloignée des frontières du massif rocheux et sa réponse qui présente de faibles fluctuations momentanées. Cette représentation porte sur le cycle annuel partagé en une période automne-hiver du 09/10/2014 au 25/02/2015 et une période printemps-été du 25/02/2015 au 01/09/2015.

Dans ces conditions, la réponse du capteur n° 3 est un segment de pente unité (en mauve). Sauf celle du capteur n° 2 du boulon instrumenté B35, les réponses sont à peu près regroupées autour de cette pente unité. Il apparaît néanmoins que les capteurs situés vers les extrémités des deux boulons présentent les plus fortes hystérésis (capteur n° 1, rouge ; capteur n° 4, bleu). Les réponses des capteurs n° 2, qui sont situés aussi en profondeur (à 7,5 m, en vert), sont quasi-réversibles. Les réponses des capteurs n° 1 (à 10 m, en rouge) présentent les fluctuations les plus visibles au cours du cycle, en lien avec les crues du Gardon notamment, en particuliers les crues en période hivernale (en rouge foncé).

Les pentes moyennes des courbes sont indiquées dans le tableau 3. Sauf celle du capteur n° 2 du boulon instrumenté B35, les pentes des capteurs n° 1 et n° 2 sont inférieures à l’unité, alors que les pentes des capteurs n° 4 (en bleu) sont supérieures ou égales à l’unité. Cette observation conduit à avancer une hypothèse qui fait intervenir le chargement apporté par la pile VII sur sa fondation rocheuse. La descente de charge s’opère quasi sans diffusion à faible profondeur et à l’aplomb immédiat de la pile, où sont situés les capteurs n° 1 et 2 des boulons instrumentés, contrairement à la surface du terrain naturel, avec les capteurs n° 3 (utilisé comme référence ici) et 4, ou l’influence de la pile est faible. La présence des discontinuités N040 accentue cet effet. Ainsi, la différence de comportement des deux couples de capteurs pourrait traduire la présence de la pile VII.

thumbnail Fig. 9

Variations des mesures extensométriques (en abscisse) avec la température (en ordonnée). Boulon instrumenté B25. Du 09/10/2014 au 25/02/2015, puis du 25/02/2015 au 01/09/2015. (a) Capteur n° 1 à 10 m ; (b) Capteur n° 2 à 7,5 m ; (c) Capteur n° 3 à 5 m ; (d) Capteur n° 4 à 2,5 m.

Variations of extensométric measurements (abscissa) as a function of temperature (ordinate).

Tableau 2

Pentes moyennes des boucles donnant les microdéformations en fonction de la température pour les deux boulons instrumentés.

Average slopes giving the microdeformations as a function of température for both instrumented bolts.

thumbnail Fig. 10

Variations des mesures extensométriques en fonction de la réponse du capteur n° 3 à 5 m. Boulon instrumenté B25. Du 09/10/2014 au 25/02/2015, puis du 25/02/2015 au 01/09/2015.

Extensométric measurements according to the sensor 3 response. Instrumented bolt B25. From 09/10/2014 to 25/02/2015 and from 25/02/2015 to 01/09/2015.

Tableau 3

Pentes moyennes des boucles donnant les microdéformations des capteurs n° 1, 2 et 4 en fonction des microdéformations des capteurs n° 3 (à 5 m).

Average slopes giving the microdeformations of sensors 1, 2 and 4 as a function of microdeformations of sensor 3 (at 5 m).

5.4 Commentaires

L’auscultation du massif de fondation de la pile VII du Pont du Gard au moyen de capteurs extensométriques révèle que les déformations enregistrées dans la roche s’inscrivent dans un cycle annuel accordé aux variations saisonnières de la température atmosphérique. Ces déformations s’observent en profondeur. Sauf les deux capteurs superficiels qui ne sont pas toujours immergés (capteurs n° 4, courbes bleues) les déformations enregistrées ne rapportent pas l’effet des fluctuations thermiques journalières. Cela correspond aux observations généralement rapportées dans la littérature qui montrent que la pénétration de la température dans la roche est lente et principalement gouvernée par les variations saisonnières. Au contraire, les fluctuations journalières dont l’amplitude est faible sont peu pénétrantes.

Il apparaît aussi que, sauf cas particulier, le rapport entre les déformations enregistrées et la température correspond aux coefficients de dilatation observés habituellement dans les roches. Un effet de la descente de charge apportée par la pile VII sur sa fondation rocheuse peut être pressenti. En contrepartie et malgré leurs positions différentes vis à vis des frontières libres du massif rocheux, les capteurs extensométriques ne révèlent pas, ou peu, d’effet de la profondeur.

Enfin, un autre apport de l’auscultation concerne la concomitance entre certaines crues du Gardon en automne et des évènements que révèle l’enregistrement des déformations, pour les capteurs les plus proches de la paroi latérale du Gardon (capteurs n° 1 et n° 2). Ces crues seraient porteuses d’une sollicitation thermique différente de la température atmosphérique, contrairement à d’autres crues. De telles observations sont rapportées dans la littérature, comme leur caractère non systématique. Ces déformations momentanées sont réversibles, avec un retour rapide au régime saisonnier.

Une modélisation élémentaire des effets des variations de la température dans la fondation rocheuse de la pile VII est proposée au paragraphe suivant, en vue d’expliquer pour partie les déformations observées, mais aussi les imperfections de ce calcul simplifié.

6 Modélisation du champ des déformations dans le massif rocheux

6.1 Objectifs de la modélisation et hypothèses

6.1.1 Objectif de la modélisation

La modélisation proposée vise à confirmer par le calcul que, pour une large part, les déformations observées sont expliquées par les variations saisonnières des températures aux limites du massif rocheux. L’approche est largement simplifiée. Parmi les très nombreux facteurs influant, beaucoup sont ignorés. La roche est homogène. Le modèle ne cherche pas à décrire en détail la morphologie du massif (un éperon), sa structure géologique (un massif karstique et fracturé), son rôle de fondation d’un appui très lourd et son contexte environnemental (tous les facteurs de contrôle en jeu). Les déformations calculées, induites par les variations thermiques, seront comparées aux mesures extensométriques issues de l’auscultation.

6.1.2 Hypothèses

Le massif rocheux d’appui de la pile VII est modélisé à deux dimensions dans le plan axial du pont-aqueduc. Le modèle est établi en champ libre (en l’absence de l’ouvrage). Le massif est homogène. En élévation, il est délimité par la surface libre horizontale de la rive droite, qui est située vers la cote 21,5 m NGF et s’étend de la pile VII vers la pile VI et au-delà (Figs. 1 et 2). Latéralement, il est délimité par la paroi verticale du goulet qui constitue le lit mineur du Gardon. Le massif est infini dans les deux autres directions du plan vertical.

Pour décrire approximativement les températures moyennes mensuelles observées à Vers Pont du Gard, la variation de la température atmosphérique est harmonique, avec, sur une période annuelle, une amplitude Δθ = 10 °C autour d’une moyenne θ0 = 15 °C. Cette variation s’applique sur les deux faces libres du modèle 2D.

En situation courante, la température de l’eau du Gardon est supposée égale à la température de l’atmosphère y-compris pendant les crues. Ces dernières se traduisent par un débordement de l’eau hors du lit mineur, intéressant ainsi et simultanément les deux faces libres du modèle. La symétrie diagonale du modèle est conservée. Pour simuler le cas particulier de l’influence de la température de l’eau pendant certaines crues, un signal de température en forme d’hydrogramme sera superposé à la variation saisonnière.

6.2 Principes de la modélisation

6.2.1 Domaine de calcul 2D dans le massif rocheux

Le domaine de calcul 2D est situé à l’intérieur du massif dans le plan axial du pont-aqueduc où ont été implantés les boulons instrumentés B25 et B35 (Fig. 1). Ce profil vertical porte le repère local (O, x, y) indiqué sur la figure 11. Son origine O est située sur la surface libre du massif et au bord du flanc du goulet du Gardon. Le domaine de calcul se situe dans le coin supérieur gauche du quart-infini (secteur AOB). Les frontières libres du massif où s’exercent simultanément les variations de températures sont les côtés OA (surface libre) et OB (flanc du goulet). La bissectrice de l’angle (AOB) constitue un axe de symétrie du modèle. La présence de l’ouvrage est ignorée.

thumbnail Fig. 11

Profil de calcul dans le massif rocheux de fondation de la pile VII du Pont du Gard.

Calculation profile in the rock mass foundation of the Pont du Gard pier VII.

6.2.2 Paramètres

Le calcul des variations de la température dans le massif rocheux appelle à définir les paramètres représentatifs du comportement du calcaire urgonien. Sauf la masse volumique ρ du calcaire qui a été mesurée sur des carottes provenant du site, les valeurs les plus vraisemblables des paramètres sont issues de tables spécialisées. Les paramètres thermiques adoptés sont indiqués dans le tableau 4 : le coefficient de dilatation thermique δ, la conductivité thermique λ et la capacité thermique massique c. Avec ρ, ces deux derniers paramètres définissent la diffusivité thermique α qui est reportée dans le tableau 4 (α = λ / c ρ).

Tableau 4

Paramètres adoptés pour les calculs.

Parameters for calculation.

6.3 Réponse à une élévation de la température

Le massif rocheux possède une température initiale uniforme θ0. Au temps t = 0, la température est portée à la température extérieure θ1 sur les faces libres OA (y = 0) et OB (x = 0), puis elle est maintenue constante. La répartition de la température dans le massif (x > 0, y > 0, t > 0) est donnée par l’expression (Schneider, 1974 ; Sunden, 2012) : (1) avec ζ = 2 (αt)0,5, où α est la diffusivité thermique dans le massif, et erf est la fonction erreur de Gauss.

Le calcul est effectué pour une augmentation de la température extérieure de 1 °C (θ0 = 0, θ1 1 °C). Les réponses calculées aux quatre points situés le long des boulons instrumentés B25 et B35 sont peu différentes, en accord avec les mesures des déformations extensométriques recueillies sur le terrain. L’influence d’une variation de la température extérieure est à peu près la même aux huit points examinés. Dans le détail et en termes de progression de la température, les points les plus profonds dans le massif sont en retard sur les autres (points n° 2 et 3). Au contraire, les points situés près de la paroi verticale OB sont les plus en avance (points n° 1).

6.4 Evolution harmonique de la température extérieure

6.4.1 Température extérieure harmonique

La sollicitation thermique extérieure s’applique sur les faces libres OA (y = 0) et OB (x = 0) et prend la forme d’une sinusoïde de période T = 1 an et d’amplitude Δθ0 = 10 °C autour de la température moyenne θ0 : (2) où ω est la pulsation, ω = 2π/T, et T la période (T = 1 an = 3,1536 107 s). La température extérieure est à son minima à t = 0 (en hiver).

6.4.2 Solution

La répartition de la température dans le massif (x > 0, y > 0, t > 0) est donnée par les expressions suivantes (VanSant, 1983) : (3) et avec ξ = [ω/(2α)]0,5. En tous points, les déformations de la roche sous l’effet des variations de la température sont données par la relation : (4)où δ est le coefficient de dilatation thermique (Tab. 4). Dans la suite, θ0 = 0.

6.4.3 Evolution dans le temps le long des boulons instrumentés

La figure 12 montre l’évolution des déformations calculées en fonction du temps aux quatre points situés le long du boulon instrumenté B25 et ceux situés le long du boulon instrumenté B35 d’après (3). Le calcul est effectué pendant quatre cycles annuels. La température extérieure est représentée à la même échelle que les microdéformations (en gris). Ces déformations sont peu différentes, ce qui traduit une réponse à peu près homogène aux huit points examinés. Les points les plus profonds dans le massif sont en retard sur les autres et les amplitudes y sont plus faibles (points n° 2 et 3). Au contraire, les points situés près des parois extérieures, en particulier la paroi verticale OB, sont les plus en avance et les plus exposés aux variations de la température (points n° 1, en rouge). Situés à la même distance des parois OA et OB (à 1,4 m environ), les points n° 1 et n° 4 du boulon B35 jouent un rôle quasi-symétrique.

Le tableau 5 donne les déformations calculées mini et maxi au cours des cycles de température. Avec une amplitude de 10 °C, la température extérieure passe par son minimum à t = 0 et par son maximum à t = 0,5. A l’image de ces extrema, les extrema des déformations sont séparés par une demi-période T/2 = 0,5. Les amplitudes des déformations le long des boulons instrumentés varient entre 35 et 83 10−6 environ. Ces amplitudes sont à comparer aux amplitudes moyennes enregistrées, qui sont de l’ordre de 50 10−6 (paragraphe 5,1), mais qui sont moins contrastées avec la profondeur que celles fournies par le calcul.

Les calculs ont été réalisés en d’autres points du domaine, le long de la diagonale principale du domaine (bissectrice de l’angle (AOB)) et le long d’une horizontale du massif. L’amplitude de la température diminue quand la distance aux parois augmente. Le déphasage augmente. La variation de la température est inférieure à 2 °C à 5 m de profondeur, avec un déphasage de Tτ/4 environ, et inférieure à 1 °C à 10 m de profondeur, avec un déphasage de 3Tτ/4 environ. Située à 2,5 m de profondeur dans le massif, l’horizontale est implantée à proximité des boulons instrumentés B25 et B35. Les déformations calculées le long de cette horizontale sont comparables à celles calculées le long des boulons instrumentés.

thumbnail Fig. 12

Calcul des températures dans le massif rocheux. Température extérieure de forme sinusoïdale. (a) Le long du boulon instrumenté B25 ; (b) Le long du boulon instrumenté B35.

Temperatures calculation in the rock mass. Sine-shaped outside temperature.

Tableau 5

Amplitudes des déformations calculées le long des boulons instrumentés.

6.5 Effet d’une crue

6.5.1 Température extérieure et conditions de calcul

L’effet thermique d’une crue du Gardon dans le massif rocheux est simulé en supposant que, pendant cet épisode, la température de l’eau est différente de celle de l’air et que, du fait de son débordement hors du lit mineur, l’eau s’écoule sur les deux faces libres du domaine de calcul. Ainsi, la sollicitation thermique est représentée par sa composante harmonique d’amplitude Δθ0 = 10 °C à laquelle se superpose un signal en forme d’hydrogramme. Deux crues successives sont simulées, la première au printemps et la seconde en automne.

Le signal thermique adopté est homothétique au débit moyen journalier enregistré pendant la crue du 22 et 23 novembre 2016 à la station de Remoulins. Le débit maximal est de 430 m3/s et la décrue s’étend jusqu’au 15 décembre suivant, avec l’arrivée d’une nouvelle crue. L’amplitude donnée au signal thermique est de 3 °C. Il est dénommé H(t). Les crues sont introduites pendant l’année n = 2 au temps t = 1,35 an en période de croissance de la température (au printemps), puis au temps t = 1,85 an en période de décroissance de la température (en automne). Elles s’étendent sur une durée d’une vingtaine de jours. Mais la décrue est néanmoins rapide. A l’image de la crue réelle et au bout de quatre jours, la température est inférieure à 10 % du pic (0,3 °C). Les graphiques de la figure 13 montrent cette sollicitation thermique résultante qui est appliquée simultanément sur les deux faces libres du massif (l’échelle de la température est multipliée par 9).

thumbnail Fig. 13

Calcul des températures dans le massif rocheux. Température extérieure de forme sinusoïdale avec superposition d’une crue au printemps et en automne. (a) Le long du boulon instrumenté B25 ; (b) Le long du boulon instrumenté B35.

Temperatures calculation in the rock mass. Sine-shaped outside temperature with the superposition of a flood in spring and autumn.

6.5.2 Effet d’une crue

Ce problème ne possède pas de solution analytique. Aussi, l’effet de la crue est calculé par convolution de la distribution des températures θ(x, y, t) par le signal thermique H(t). La distribution θ est calculée avec (1). Cet effet de la crue est superposé à la solution harmonique (3). A titre d’illustration, l’apport de chaleur est positif avec la crue de printemps (+3 °C), puis négatif avec la crue d’automne (−3 °C). Les graphiques de la figure 13 montrent les déformations calculées en fonction du temps aux points situés le long des boulons instrumentés B25 et B35, à comparer aux graphiques de la figure 12. Il est clair qu’à l’échelle de l’amplitude thermique extérieure de 10 °C, seuls les points proches de la surface du massif sont sensibles à l’effet thermique de la crue (points n° 1 et n° 4 des extensomètres). Tous ces points sont situés à moins de 1,5 m d’une des limites du massif. Il apparaît aussi que les deux crues ont un effet symétrique, conformément aux hypothèses de calcul. Le retour au régime saisonnier est rapide.

La pénétration de la température est faible dans le massif. Les courbes calculées montrent une parenté avec les courbes des déformations recueillies pendant l’auscultation (exemple du capteur n° 1 du boulon B25, proche de la paroi du Gardon, en rouge sur la Fig. 8).

6.6 Commentaires

6.6.1 Estimation des microdéformations dans la roche

Dans le cadre des hypothèses adoptées, la solution harmonique aboutit à des amplitudes thermiques comprises entre 3,4 et 8,3 °C environ autour des boulons instrumentés, pour une amplitude de la température extérieure égale à 10 °C. Avec le coefficient de dilatation thermique choisi δ = 10 10−6 /K pour représenter le comportement du calcaire urgonien (Tab. 4), les microdéformations saisonnières calculées sont comprises dans l’intervalle 34 < Δε < 83 μdéf (Tab. 5), soit des doubles amplitudes comprises entre 68 < 2Δε < 166 μdéf. Ces ordres de grandeur sont globalement en accord avec les mesures extensométriques enregistrées pendant plusieurs saisons.

Ainsi, l’amplitude des microdéformations de la roche peut être attribuée pour une large part aux variations thermiques dans le massif rocheux quant à leur composante saisonnière. De même, les variations momentanées peuvent être attribuées pour partie aux petites variations thermiques extérieures et peu pénétrantes. À ce titre, les petits épisodes de déformation qui s’observent en concordance avec des crues du Gardon sont assez bien reproduits par la simulation.

Ce calcul simplifié de l’influence des conditions environnementales sur le massif rocheux s’adresse à la pile VII. En rive gauche du Gardon, la pile VIII se situe dans une position plus encaissée au pied du versant du canyon et un peu plus à l’écart du flanc du chenal (Fig. 1). Il est vraisemblable que les amplitudes des déformations d’origine thermique soient plus petites dans cette fondation rocheuse en comparaison de la rive droite.

6.6.2 Limitations du modèle

Etablie à deux dimensions, la simulation des effets thermiques ignore la configuration tridimensionnelle de l’éperon rocheux qui porte la pile VII. Le massif est supposé homogène et dépourvu de cavités karstiques. Ses frontières libres sont régulières, contrairement à la morphologie réelle de l’éperon. La sollicitation thermique s’applique sur ces frontières en ignorant les circulations d’air et d’eau à l’intérieur du réseau karstique. Les débordements du Gardon hors du lit mineur ne sont pas répertoriés. La présence des ouvrages est écartée, tant par omission des descentes de charges et des effets de voûte qu’ils génèrent, que des actions extérieures sur ces superstructures (vent, température, forces hydrodynamiques pendant les crues, etc.) et des interactions avec le massif rocheux, mais aussi par omission de la protection thermique offerte localement sur la largeur de la pile (une longueur de l’ordre de 5 m à partir du point O le long de la limite OA, Fig. 11).

6.6.3 Conséquences

L’appui rocheux de la pile VII du Pont du Gard est soumis à ce régime thermique cyclique depuis deux millénaires. Malgré l’allure répétée des cycles, la durée limitée de l’auscultation ne permet pas d’affirmer le caractère réversible des déformations générées. S’il n’est pas possible d’en évaluer les conséquences à ce jour, cette accumulation de cycles ne peut pas être ignorée. Elle concerne le calcaire urgonien et son caractère fracturé et karstique. Elle concerne aussi les ouvrages, car ces déformations du massif de fondation d’origine thermique se transmettent aux structures et se superposent en partie aux propres déformations thermomécaniques des maçonneries. Ces dernières ne sont pas quantifiées aujourd’hui.

Le fluage et les conditions environnementales sont connus pour leurs effets défavorables à long terme sur les ouvrages et les ouvrages en maçonnerie notamment. Des effets thermiques ont déjà été évoqués au Pont du Gard pour expliquer le devers du pont-aqueduc en direction de l’amont (dévers de 1,3 m à la hauteur de son troisième étage ; Paillet, 2005). Avec sa face sud-ouest plus exposée à l’ensoleillement, la dissymétrie de la sollicitation thermique diurne que procure son implantation serait à l’origine de ces déformations cumulées de fatigue.

Dans ce sens, les déformations saisonnières et momentanées d’origine thermique qui prennent corps dans la fondation rocheuse de la pile VII pourraient jouer un rôle défavorable sur les maçonneries. Mais, l’auscultation de l’appui rocheux de la pile VII n’apporte pas d’élément de réponse sur ce sujet et à ce stade, le lien restant à établir entre l’ouvrage et ses fondations en termes d’interactions.

7 Conclusion

En 2008, les travaux de renforcement de la fondation rocheuse de la pile VII du Pont du Gard ont donné l’occasion d’installer un dispositif de mesure extensométrique à titre exploratoire. Des données relatives aux conditions environnementales du site ont été recherchées en vue d’accompagner l’interprétation des résultats de l’auscultation présentée ici.

Les variations de température atmosphérique expliquent pour l’essentiel les déformations qui ont été enregistrées dans le massif rocheux par les extensomètres, avec leurs composantes saisonnières et journalières. Ces enregistrements traduisent les observations souvent rapportées dans la littérature. Les variations diurnes de la température pénètrent peu dans le massif. Les variations saisonnières se ressentent à plusieurs mètres de profondeur. Plus original, des petits épisodes de déformation s’observent en automne et en hiver, en concordance avec des crues du Gardon. Ces variations concernent essentiellement les capteurs situés près de la paroi rocheuse subverticale qui borde le lit mineur du Gardon, ce qui amène à suggérer que certaines crues du Gardon sont porteuses d’une sollicitation thermique au sein su massif urgonien karstifié. Ce caractère non systématique de l’effet des crues fait écho aux observations de la littérature, quant à l’effet des crues sur la température des cours d’eau.

Fondées sur des hypothèses simplificatrices fortes, une simulation des effets de la température dans le massif rocheux aboutit à une estimation représentative des déformations enregistrées pendant l’auscultation sous la pile VII. Cela vaut pour les cycles saisonniers de la température atmosphérique. Cela vaut aussi quand le Gardon apporte sa propre sollicitation thermique à l’occasion d’une crue.

Malgré le caractère limité et imparfait de cette instrumentation, il paraît important d’inscrire son suivi dans la durée, comme le prouve les enregistrements effectués pendant près de huit ans. Une amélioration du dispositif d’acquisition des mesures serait à envisager. Puis de nouvelles informations seraient à collecter, avec le recueil des données météorologiques, la température des eaux du Gardon, le repérage des crues et des épisodes de débordement hors du lit mineur. L’instrumentation pourrait être élargie à de nouveaux points de mesure des températures (sur la paroi rocheuse ou dans des cavités karstiques accessibles sous l’eau et abritées des crues). L’étape suivante pourrait consister au suivi des déformations des ouvrages en maçonnerie, en particulier celles du pont-aqueduc, au moins pendant un cycle saisonnier.

Les conséquences pour les ouvrages anciens des déformations cycliques de la fondation rocheuse restent à analyser. La quantification de ces effets dans le massif rocheux en termes de fatigue ou de fluage demeure un sujet difficile, sans solution concrète dans un avenir proche, mais qui appelle à poursuivre le recueil d’informations et de données supplémentaires.

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Citation de l’article : Jean François Serratrice. Suivi des déformations du massif rocheux sous la fondation de la pile VII du Pont du Gard. Rev. Fr. Geotech. 2020, 164, 2.

Liste des tableaux

Tableau 1

Dates d’occurrence de quelques crues du Gardon et débits journaliers maximum à Remoulins. D’après la Banque Hydro (EauFrance, 2019).

Dates of occurrence of some Gardon floods and maximum daily flows at Remoulins.

Tableau 2

Pentes moyennes des boucles donnant les microdéformations en fonction de la température pour les deux boulons instrumentés.

Average slopes giving the microdeformations as a function of température for both instrumented bolts.

Tableau 3

Pentes moyennes des boucles donnant les microdéformations des capteurs n° 1, 2 et 4 en fonction des microdéformations des capteurs n° 3 (à 5 m).

Average slopes giving the microdeformations of sensors 1, 2 and 4 as a function of microdeformations of sensor 3 (at 5 m).

Tableau 4

Paramètres adoptés pour les calculs.

Parameters for calculation.

Tableau 5

Amplitudes des déformations calculées le long des boulons instrumentés.

Liste des figures

thumbnail Fig. 1

Profil schématique du massif rocheux sous les fondations des piles VI, VII et VIII du Pont du Gard. Principe du renforcement par boulonnage. Les directions de deux principales familles de discontinuités sont indiquées en rouge. Vue de l’amont vers l’aval.

Schematic profile of the rock mass under the foundations of piers VI, VII and VIII. Principe of reinforcement by bolting. The direction of the two main families of discontinuities are indicated in red. View from upstream to downstream.

Dans le texte
thumbnail Fig. 2

Principe de l’implantation des deux boulons instrumentés B25 et B35 sous la fondation de la pile VII.

Principle of the implantation of the two intstrumented bolts B25 and B35.

Dans le texte
thumbnail Fig. 3

Enregistrements de la température dans le boîtier de mesure, températures moyennes mensuelles min et max à Vers Pont du Gard, températures des eaux du Gardon et occurrences des crues du Gardon (débits supérieurs à 50 m3/s). Période de novembre 2013 à mai 2017.

Temperature records in the measuring box, average monthly temperatures min and max in Vers Pont du Gard, Gardon water temperatures and occurrence of Gardon floods (flow rate higher than 50 m3/s). Period from November 2013 to May 2017.

Dans le texte
thumbnail Fig. 4

Vues du dispositif instrumental. (a) Deux capteurs extensométriques avant leur assemblage ; (b) Un capteur installé dans un centreur et assemblé avec deux tronçons de barre au moyen de manchons (diamètre 28 mm). Photos Soldata.

View of experimental device. (a) Two extensometric sensors before their assembly; (b) A sensor put in a spacer and piled up with two pieces of bar by means of couplers.

Dans le texte
thumbnail Fig. 5

Enregistrements des vitesses de foration (VIA) et position des capteurs extensométriques (points rouges) dans les forages. (a) Forage B25 ; (b) Forage B35.

Drill rate logging (ROP) and positions of sensors in the borholes. (a) Borehole B25; (b) Borehole B35.

Dans le texte
thumbnail Fig. 6

Auscultation dans la période de novembre 2013 à mai 2017. Réponses des capteurs à corde vibrante. (a) Boulon instrumenté B25 ; (b) Boulon instrumenté B35.

Monitoring in the period from November 2013 to May 2017. Sensors responses. (a) Instrumented bolt B25; (b) Instrumented bolt B35.

Dans le texte
thumbnail Fig. 7

Auscultation dans la période de septembre 2016 à février 2017. Enregistrement de la température dans le boîtier de mesure, températures moyennes mensuelles min et max à Vers Pont du Gard et occurrences des crues du Gardon (débits supérieurs à 50 m3/s).

Monitoring in the period from November 2013 to May 2017. Temperature records in the measuring box, average monthly temperatures min and max in Vers Pont du Gard, Gardon water temperatures and occurrence of Gardon floods (flow rate higher than 50 m3/s).

Dans le texte
thumbnail Fig. 8

Auscultation dans la période de septembre 2016 à février 2017. Réponses des capteurs à corde vibrante. (a) Boulon instrumenté B25 ; (b) Boulon instrumenté B35.

Monitoring in the period from September 2016 to February 2017. Sensors responses. (a) Instrumented bolt B25; (b) Instrumented bolt B35.

Dans le texte
thumbnail Fig. 9

Variations des mesures extensométriques (en abscisse) avec la température (en ordonnée). Boulon instrumenté B25. Du 09/10/2014 au 25/02/2015, puis du 25/02/2015 au 01/09/2015. (a) Capteur n° 1 à 10 m ; (b) Capteur n° 2 à 7,5 m ; (c) Capteur n° 3 à 5 m ; (d) Capteur n° 4 à 2,5 m.

Variations of extensométric measurements (abscissa) as a function of temperature (ordinate).

Dans le texte
thumbnail Fig. 10

Variations des mesures extensométriques en fonction de la réponse du capteur n° 3 à 5 m. Boulon instrumenté B25. Du 09/10/2014 au 25/02/2015, puis du 25/02/2015 au 01/09/2015.

Extensométric measurements according to the sensor 3 response. Instrumented bolt B25. From 09/10/2014 to 25/02/2015 and from 25/02/2015 to 01/09/2015.

Dans le texte
thumbnail Fig. 11

Profil de calcul dans le massif rocheux de fondation de la pile VII du Pont du Gard.

Calculation profile in the rock mass foundation of the Pont du Gard pier VII.

Dans le texte
thumbnail Fig. 12

Calcul des températures dans le massif rocheux. Température extérieure de forme sinusoïdale. (a) Le long du boulon instrumenté B25 ; (b) Le long du boulon instrumenté B35.

Temperatures calculation in the rock mass. Sine-shaped outside temperature.

Dans le texte
thumbnail Fig. 13

Calcul des températures dans le massif rocheux. Température extérieure de forme sinusoïdale avec superposition d’une crue au printemps et en automne. (a) Le long du boulon instrumenté B25 ; (b) Le long du boulon instrumenté B35.

Temperatures calculation in the rock mass. Sine-shaped outside temperature with the superposition of a flood in spring and autumn.

Dans le texte

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