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Numéro
Rev. Fr. Geotech.
Numéro 164, 2020
Numéro d'article 4
Nombre de pages 14
DOI https://doi.org/10.1051/geotech/2021001
Publié en ligne 17 février 2021

© CFMS-CFGI-CFMR-CFG, 2021

1 Introduction

La technologie des géostructures énergétiques consiste à adapter les structures géotechniques, comme les pieux de fondation, les parois moulées ou les tunnels, afin de les transformer en échangeurs de chaleur avec le sol. De fait, ce sont des systèmes géothermiques à basse enthalpie, avec le gros avantage de réduire les coûts initiaux d’installation grâce à l’utilisation des structures géotechniques qui seraient réalisées dans tous les cas. Il s’agit d’une alternative innovante pour chauffer ou refroidir les bâtiments et les infrastructures (Laloui et Di Donna 2013).

Le principe consiste à mettre en place un réseau de tuyaux à l’intérieur des cages d’armatures métalliques présentes dans la structure en béton. Un fluide caloporteur, qui circule dans le réseau de tuyaux, échange de la chaleur avec le sol à travers le béton. Ceci est possible grâce à la température du sol qui reste constante toute l’année, à l’exception des premiers mètres, étant donc supérieure à celle de l’air externe en hiver, et inférieure en été. Une différence de température de quelques degrés entre le fluide caloporteur et le sol est suffisante pour faire fonctionner une pompe à chaleur, laquelle adapte la température provenant du sol à celle nécessaire pour chauffer ou refroidir les bâtiments. Les échanges de chaleur entre la géostructure et le sol induisent des variations de température cycliques sur les deux, et l’efficacité du système doit répondre à la fois à des critères énergétiques (bonne production de chaleur ou de froid) et géotechniques-structurels (analyse des contraintes et déformations thermiques du sol et de la structure en béton), qui dépendent fortement des conditions locales du site accueillant la construction. Il s’agit donc d’un système complexe avec un comportement dépendant de différents phénomènes thermiques, hydrauliques et mécaniques, éventuellement couplés, à la fois dans le sol et dans la structure. De nombreuses recherches ont été menées dans les vingt dernières années sur ces différents aspects, et ceci a permis le développement de méthodes d’analyse et de conception des géostructures énergétiques de plus en plus avancées (Laloui et Rotta Loria, 2019).

La première application à avoir été étudiée est sûrement celle des pieux de fondation énergétiques, probablement grâce à ses similitudes géométriques avec les sondes géothermiques verticales classiques. Ces études, à la fois numériques et expérimentales, ont permis, d’un côté, d’évaluer l’impact des cycles thermiques sur les éventuelles déplacements et contraintes thermo-induits dans les pieux (Amatya et al., 2012 ; Di Donna et Laloui, 2014 ; Di Donna et al., 2016c ; Yavari et al., 2016a ; Rotta Loria et Laloui, 2017) et, de l’autre côté, d’optimiser leur efficacité énergétique (Loveridge et Powrie 2013 ; Cecinato et Loveridge, 2015). Plus récemment, l’application de cette technologie aux parois moulées et aux tunnels a attiré de plus en plus l’attention des chercheurs. L’avantage évident, par rapport aux pieux, est la plus grande surface en contact avec le sol, et donc potentiellement un meilleur échange thermique, que ce type de structure offre. De l’autre côté, leur géométrie, et en particulier le fait d’avoir une face du côté excavation qui ne soit pas en contact avec le sol, mais avec l’air, pose des questions ultérieures au moins en termes d’échanges thermiques potentiels. Différentes études ont été réalisées, ou sont en cours, pour mieux comprendre le comportement, encore une fois géotechnique ainsi qu’énergétique, des parois thermoactives (Xia et al., 2012 ; Di Donna et al., 2016a, 2021 ; Angelotti et Sterpi, 2018 ; Rammal et al., 2018 ; Delerablee et al., 2019 ; Zannin et al., 2020) et des tunnels thermoactifs (Franzius et Pralle, 2011 ; Di Donna et Barla, 2016 ; Barla et Di Donna, 2018 ; Barla et al., 2019 ; Cousin et al., 2019 ; Peltier et al., 2019 ; Insana et Barla, 2020).

Indépendamment du type d’ouvrage géotechnique utilisé, des questions se posent aussi sur la réponse des sols de fondation et des interfaces sol-structure aux cycles thermiques et sur les possibles conséquences en termes, par exemple, de tassements additionnels de la structure (Di Donna et al., 2016b ; Yavari et al., 2016b ; Vasilescu et al., 2018 ; Maghsoodi et al., 2020).

Malgré les nombreux résultats scientifiques, la mise en place de géostructures énergétiques opérationnelles rencontre encore des freins en France, comme dans d’autres pays. En France, le premier cadrage concret de la technologie a été publié récemment (CFMS, Syntec Ingenierie and Soffons – FNTP, 2016). Les premières applications ont été européennes et remontent aux années 1980, avec des installations réalisées en Autriche. La technologie s’est ensuite développée aussi en Suisse, en Allemagne, en Angleterre et, plus récemment aux Etats Unis et en Asie. La figure 1a montre le nombre de géostructures énergétiques recensé par pais (liste cependant non exhaustive), selon une étude récente (Di Donna et al., 2017).

La figure 1b montre l’évolution forte du nombre d’installations durant les dix dernières années, ainsi que la réduction correspondante en émission de CO2. Les données disponibles ne sont sûrement pas exhaustives et ne correspondent pas à la totalité des cas réels existants, mais la figure donne un aperçu de l’intérêt croissant porté à cette technologie.

Dans cet article, les sections 2 et 3 présentent un résumé des différents aspects qui jouent un rôle dans le comportement, géotechnique et énergétique respectivement, des géostructures thermoactives. La section 4 illustre un cas récent d’application de la technologie aux parois moulées d’une gare de la ligne B du métro de Rennes, en France. Après la présentation du cas d’étude, les premiers résultats des Tests de Réponse Thermique Opérationnels (T.R.T.O.) sont discutés. La dernière section 5 présente les résultats de la modélisation thermo-hydraulique (TH) aux éléments finis du cas d’étude, et la comparaison avec les mesures sur site.

thumbnail Fig. 1

Diffusion des géostructures énergétiques (a) dans différents pays et (b) depuis 1988.

World spread of energy geostructures (a) in different countries and (b) since 1988.

2 Aspects géotechniques

Le rôle structurel des géostructures énergétiques en terme de résistance mécanique, que ce soit des pieux de fondation, des tunnels ou des parois, reste bien sûr fondamental. Pour cette raison, de nombreuses études ont été réalisées pour comprendre si le fait d’utiliser ces structures comme échangeurs de chaleur avec le sol, en les soumettant à des cycles de variation de température, pouvait affecter leur performance structurelle et géotechnique. Il s’agit de comprendre si l’existence de ces échanges de chaleur peut induire des déplacements additionnels du sol (tels que des tassements en surface) ou en réduire la capacité portante. Pour répondre à ces interrogations, il est important de connaître d’un côté la réponse du sol et de l’interface sol-structure aux variations de température, et de l’autre côté celle de la structure elle-même.

2.1 Comportement thermique des sols

De nombreuses études scientifiques montrent que le comportement thermique des sols dépend de leur nature, étant généralement thermoélastique dans le cas de sols grossiers mais thermo-élastoplastique dans le cas des sols argileux. Le comportement thermoélastique des sables, dilatant pendant le chauffage et réversible en refroidissement, dépend du coefficient de dilatation thermique du squelette solide. Dans le cas des argiles, le développement de déformations irréversibles (plastiques) suite à un chargement thermique dépend de leur histoire de chargement. Les argiles sur-consolidées (OC) montrent un comportement plutôt thermoélastique, qui est lié aux coefficients de dilatation thermique des minéraux présents (Casarella et al., 2020b), tandis qu’en conditions normalement consolidées (NC), elles montrent une réduction de volume lors d’une augmentation de température, qui s’avère irréversible quand la température revient à sa valeur initiale. Comme le montre la figure 2, ce comportement atypique a été confirmé par plusieurs études sur différents types d’argile (Campanella et Mitchell, 1968 ; Baldi et al., 1988 ; Hueckel et Baldi 1990 ; Del Olmo et al., 1996 ; Cekerevac et Laloui, 2004 ; Abuel-Naga et al., 2009). Plusieurs modèles constitutifs phénoménologiques, principalement basés sur la théorie de l’élastoplasticité, ont permis de reproduire ce comportement (Laloui et François, 2009). Cependant, ils sont souvent basés sur l’introduction de paramètres spécifiques difficiles à identifier. Des études sont en cours pour chercher la source de ce comportement au niveau microscopique et développer des modèles capables de le quantifier à partir des caractéristiques et phénomènes physiques (Casarella et al., 2020a).

La réponse volumétrique d’une argile soumise à plusieurs cycles thermiques est illustrée dans la figure 3. Il s’agit d’une argile naturelle de Genève (Suisse), normalement consolidée. L’échantillon, prélevé in situ et non remanié, a été reconsolidé en conditions œdométriques en laboratoire et ensuite soumis à des cycles thermiques entre 20 et 60 °C.

Les résultats confirment le comportement thermoplastique discuté auparavant et montrent que l’accumulation de déformations irréversibles se fait principalement sur les premiers cycles, après lesquels le comportement tend à devenir thermo-élastique (Di Donna et Laloui, 2015). Les différents aspects qui caractérisent le comportement thermique des argiles ont, dans la plupart des cas courants, des conséquences en termes de déplacements et de capacité portante des géostructures énergétiques largement acceptables (Di Donna et Laloui, 2014).

Pour finir, la réponse différente des sols grossiers et des sols fins aux changements de température se retrouve aussi dans l’analyse du comportement thermique de l’interface sol-structure. De fait, plusieurs études confirment que le comportement de l’interface sable-structure n’est pas influencé par la température, tandis que celui de l’interface argile-structure le serait (Di Donna et al., 2016b ; Maghsoodi et al., 2020). Les résultats sur cet aspect ne sont pas toujours en accord, mais montrent qu’il s’agit d’un effet généralement acceptable en terme de sécurité pour les géostructures énergétiques.

thumbnail Fig. 2

Déformation volumétrique thermique de différentes argiles.

Thermal volumetric deformation of different clays.

thumbnail Fig. 3

Comportement volumique thermique cyclique de l’argile de Genève : (a) plan œdométrique et (b) cycles thermiques (Di Donna et Laloui, 2015).

Thermal cyclic behaviour of Geneva clay: (a) oedometric plane and (b) thermal cycles (Di Donna and Laloui, 2015).

2.2 Contraintes et déformation des géostructures énergétiques

En plus de la réponse du sol, il est nécessaire aussi de prendre en compte la réponse thermomécanique de la structure elle-même. En général, le béton a un comportement thermoélastique, et si on imagine de chauffer un élément structurel libre de se déformer, il va se dilater selon son coefficient de dilatation thermique. Pour avoir un ordre de grandeur, si on considère un pieu de 30 m de longueur et un béton avec un coefficient de dilatation thermique de 10−5 °C−1, une variation de température de 30 °C induirait un déplacement en tête du pieu de 4,5 mm (0,15 mm/°C).

Dans la réalité, les géostructures ne sont pas libres de se dilater sous l’effet de la température, et leur déformation est au moins partiellement empêchée par le sol qui les entoure et éventuellement la structure qu’elles portent (par exemple dans le cas des pieux de fondation). Ceci réduit la déformation libre (et donc par exemple le déplacement en tête de pieu), mais induit des contraintes thermiques (de compression dans le cas d’une augmentation de température) qui peuvent être calculées en première approximation comme le produit entre le module de rigidité élastique du béton et la déformation empêchée. Si on reprend l’exemple du pieu, considérant un module élastique de 30 GPa et que le pieu soit complètement bloqué (toute la déformation thermique est empêchée), cela correspondrait à une contrainte additionnelle dans le pieu de 9 MPa, soit 300 kPa/°C.

La réalité est un compromis entre ces deux conditions extrêmes (complètement libre et complètement contraint), mais globalement on pourrait dire que plus la structure est libre de se dilater, plus il y aura un déplacement important et moins il y aura de contraintes thermiques et vice-versa. Des considérations analogues peuvent être faites pour le refroidissement.

La figure 4 montre les valeurs de contraintes et de déplacements induits par les variations de température, mesurées dans des essais à échelle réelle réalisés sur des pieux énergétiques. Dans la pratique, elles peuvent être utilisées pour avoir un ordre de grandeur des effets que les changements de température induisent sur le comportement géotechnique des pieux énergétiques (Di Donna et al., 2017). Il est important de noter que, même si les valeurs de contrainte thermique peuvent apparaître importantes, elles restent largement inférieures aux valeurs limites admissibles de résistance du béton.

Les données disponibles concernant les effets mécaniques induits par les changements de température dans les parois et les tunnels énergétiques sont moins nombreux. Des études récentes donnent toutefois des ordres de grandeur et montrent des valeurs de contraintes induites qui restent dans les limites d’acceptabilité vis-à-vis de la stabilité structurelle. Un exemple est représenté par le tunnel énergétique installé et monitoré dans le métro de la ville de Turin en Italie. Il s’agit d’un premier prototype de tunnel énergétique utilisant des voussoirs énergétiques brevetés par le Politecnico di Torino (Barla et Di Donna, 2018). Les mesures montrent des incréments de contrainte dans les voussoirs de l’ordre de 0,5 MPa pour des variations de température de l’ordre de 5 °C (Barla et al., 2019).

thumbnail Fig. 4

Aspects géotechniques des pieux énergétiques : (a) contrainte axiale et (b) déplacement en tête induits par les variations de température (modifié d’après Di Donna et al., 2017).

Geotechnical aspects of energy piles: (a) axial stress and (b) head displacements due to thermal variations (after Di Donna et al., 2017).

3 Aspects énergétiques

L’efficacité énergétique de cette technologie reste une question centrale, car à la différence des systèmes géothermiques classiques, comme les sondes verticales et horizontales, la géométrie des géostructures est souvent imposée par le dimensionnement structurel et ne peut pas toujours être optimisée à des fins énergétiques. Il est donc important de pouvoir prévoir les échanges thermiques envisageables pour évaluer l’intérêt de la mise en œuvre d’une telle technologie. Ceux-ci dépendent des propriétés thermiques et hydrauliques du sol, notamment la conductivité thermique, la chaleur spécifique et la perméabilité, ainsi que des conditions hydrogéologiques, notamment de la température du sol et de la présence d’une nappe phréatique et d’un écoulement souterrain. Malgré la géométrie imposée (longueur et diamètre des pieux, largeur et profondeur des parois, diamètre et épaisseur du système de soutènement des tunnels), il y a des aspects d’ingénierie qui peuvent toutefois être optimisés, comme par exemple le nombre et la forme des circuits des tubes à installer.

Dans le cas des pieux énergétiques ces aspects ont fait l’objet de nombreuses études (Gao et al., 2008 ; Batini et al., 2015 ; Loveridge et al., 2020), et la similitude géométrique avec les sondes géothermiques classiques a permis de développer plus rapidement des méthodes d’analyse. Il est désormais reconnu qu’un pieu énergétique échange en moyenne entre 20 et 100 W par m de longueur (SIA DO 190, 2005 ; Bourne-Webb, 2013). Ce sont des valeurs indicatives, sachant que dans la réalité le phénomène est loin d’être constant et le rendement varie en fonction du temps et des demandes en énergie (pic initial, plateau sur le long temps, sollicitations intermittentes, etc.). L’analyse des échanges thermiques dans le cas des parois et des tunnels énergétiques présente des difficultés additionnelles dues, entre autres, au fait que la structure est en contact à la fois avec le sol et avec l’air (par exemple à l’intérieur du tunnel, du parking, …). Afin de fournir des valeurs indicatives de chaleur échangée en été (injection de chaleur dans le sol) et en hiver (extraction de chaleur du sol) par un tunnel énergétique type en fonction des conditions souterraines (vitesse de l’écoulement souterrain, température et conductivité thermique du sol), Di Donna et Barla (2016) ont proposé une méthode numérique basée sur des simulations aux éléments finis. La même méthode a été récemment appliquée aussi aux parois (Di Donna et al., 2021). Les résultats sont présentés sous forme d’abaques, et les abaques sont obtenus par simulation numérique en imposant une condition de bord côté excavation de type convectif, une vitesse du fluide caloporteur de 0,4 m/s et une température d’entrée constante dans les circuits pour une durée de 30 jours. La chaleur échangée est évaluée à la fin de cette période. L’écoulement souterrain est considéré perpendiculaire à la paroi ou au tunnel et prend en compte l’effet barrage. La figure 5 présente une réélaboration de ces résultats à la fois pour les tunnels (à gauche) et les parois (à droite), généralisés pour être valables pour les deux modes de fonctionnement (extraction de chaleur en hiver et injection en été). Les abaques ainsi conçus donnent les valeurs de chaleur échangée par m2 de surface de contact entre la structure et le sol, en fonction de la vitesse de l’écoulement souterrain (en abscisses), de la conductivité thermique du sol (différents types de courbes) et de l’écart de température entre le sol et le fluide caloporteur (en ordonnées). C’est en effet cet écart qui règle l’échange de température, plutôt que les deux valeurs de température séparément (Di Donna et al., 2021).

La géométrie du tunnel, ainsi que celle de la paroi, considérée dans les simulations est illustrée dans les articles correspondants. Les valeurs des abaques sont à adapter aux dimensions du cas spécifique et donnent uniquement une estimation préliminaire. Pour une évaluation précise, la réalisation de modèles complets reste la solution la plus pertinente, idéalement validés par des mesures réelles in situ. Les tunnels et parois énergétiques monitorés à l’échelle réelle restent encore peu nombreux. Un cas d’étude récent et français est présenté dans la section suivante.

thumbnail Fig. 5

Abaques de puissance échangée par une paroi (droite) et un tunnel type (gauche), en fonction des conditions de sous-sol (élaborés à partir de Di Donna et Barla (2016) et Di Donna et al. (2021)).

Design charts for the estimation of heat exchange potential of a typical wall (right) and tunnel (left), as a function of underground conditions (adapted from Di Donna and Barla (2016) et Di Donna et al. (2021)).

4 Un cas d’étude

Malgré le grand nombre de recherches théoriques, numériques et expérimentales qui ont été réalisées, les cas de géostructures énergétiques en France à l’échelle réelle restent peu nombreux. Parmi ces rares cas, il y a celui de la gare Jules Ferry de la ligne du métro B de Rennes, récemment construite et entièrement équipée en géostructures énergétiques (maître d’ouvrage : Rennes Métropole ; maître d’œuvre : EGIS Rail). L’équipement géothermique installé a été testé lors de deux campagnes de Tests de Réponse Thermique Opérationnels (T.R.T.O.) par l’entreprise Aquassys afin d’évaluer son efficacité en condition de fonctionnement réel. Ceci en fait un cas d’étude très intéressant, qui fait l’objet de cette section de l’article. Après une présentation de la géométrie de l’ouvrage, du contexte hydrogéologique du site et de l’équipement géothermique adopté, les mesures de la première campagne expérimentale sont présentées. Dans la section suivante, les résultats sont interprétés à l’aide d’un modèle numérique par éléments finis de la gare.

4.1 La gare Jules Ferry et le contexte hydrogéologique

De réalisation récente, la gare Jules Ferry est située à l’intersection de l’avenue Jules-Ferry et de la rue Jean-Guéhenno dans le quartier Fougères – Sévigné (Fig. 6). Elle sera normalement mise en service en 2021 et desservira notamment la Faculté de droit et de science politique de l’Université de Rennes 1, l’IGR-IAE, les archives municipales de Rennes et le lycée Jean Macé.

La gare a une profondeur moyenne d’environ 22 m de la surface du terrain naturel jusqu’au plan de roulement. La largeur de l’ouvrage est d’environ 38 m, pour une longueur d’environ 43,5 m. Le soutènement latéral définitif a été réalisé avec des parois moulées en béton armé. La dalle est aussi en béton armé et présente une géométrie en arche renversée dans la coupe transversale (nord-sud). Un premier étage en sous-sol, d’environ 8 m de profondeur sera occupé par la billetterie, le quai se trouvant un étage plus bas (Fig. 7). Toutes les parois moulées au niveau de la zone des quais, ainsi que le radier, sont équipées comme échangeurs de chaleur géothermiques. Se trouvant à une profondeur supérieure à 8 m, elles sont a priori en dehors de la zone qui ressent des variations de température de l’air externe, ce qui est optimal vis-à-vis de l’efficacité thermique.

Comme souligné dans les sections précédentes, l’efficacité énergétique va aussi fortement dépendre des conditions hydrogéologiques du site. La géologie de Rennes est caractérisée par une assise rocheuse (altérites, grès et schistes) recouverte par des remblais, colluvions et alluvions. Ces différents horizons se présentent sous des formes altérées et fracturées sans continuité apparente. Il est, par conséquent, très difficile d’interpoler entre les sondages et de définir des zonages de substratum en fonction de l’altération et de la fracturation. Une représentation de la stratigraphie locale, avec indication de la position de la nappe, définie à partir du rapport géotechnique du projet (Terrasol, 2015) est présentée sur la figure 7. La zone intéressée par les géostructures thermoactives se trouve entre 8 et 20 m de profondeur, et donc entièrement dans les schistes et grès fragmentés (noté BRC) et très fracturés à fracturés (noté BRB).

Du point de vue hydrogéologique, mis à part les nappes perchées, temporaires et de faible importance, que l’on rencontre dans les terrains de couverture, la nappe du socle rocheux est en équilibre avec celle des altérites argileuses, et s’écoule des zones de réalimentation (lignes de crête) vers les exutoires (nappes alluviales), comme illustré sur la figure 6.

Les eaux circulent à la faveur de fractures, qui doivent être suffisamment importantes et ne doivent pas être le siège de développements intenses d’altérites argileuses colmatant les fractures. Selon les études hydrogéologiques disponibles, le site est à proximité de la ligne de partage des eaux, dans le domaine hydrogéologique A1N (versant nord de la zone de plateau nord). Les aquifères dans ce domaine réagissent peu aux variations de la pluviométrie ; leurs fluctuations sont essentiellement liées à celles du plan d’eau de la Vilaine. Les mesures piézométriques in situ concernent essentiellement la nappe du substratum qui se trouve à une profondeur comprise entre 1,6 et 2,7 m à partir du T.N. La zone intéressée par les géostructures thermoactives se trouve donc entièrement sous nappe, condition qui s’avère très favorable aux échanges thermiques.

thumbnail Fig. 6

Position de la gare Jules Ferry à Rennes et contexte hydrogéologique (Terrasol, 2015).

Position and hydrogeological context of Jules Ferry station in Rennes (Terrasol, 2015).

thumbnail Fig. 7

Stratigraphie à proximité de la gare Jules Ferry (Terrasol, 2015).

Stratigraphy around Jules Ferry station (Terrasol, 2015).

4.2 Description de l’équipement géothermique

La partie de l’ouvrage équipée avec les échangeurs géothermiques est divisée en 5 zones, comme illustré dans la figure 8. Les zones 1, 2, 3 et 4, d’ouest à est, incluent des parois verticales (côté nord et sud, mais aussi ouest et est pour les zones 1 et 4 respectivement) et des parties du radier de fondation, la zone 5 se trouve entièrement dans le radier de fondation du côté nord.

L’équipement géothermique comprend au total 93 circuits secondaires, raccordés en parallèle sur un circuit principal, dont 42 circuits en spirale dans les parois verticales (15 + 15 dans les parois nord et sud, et 6 + 6 dans les parois est et ouest, notés SP en Fig. 8), 41 circuits en forme de U dans le radier de fondation (9 dans la zone 1, 11 dans la zone 2, 12 dans la zone 3 et 9 dans la zone 4, notés U en Fig. 8), et 10 circuits en spirale dans la zone 5 du radier (3 positionnés en correspondance de chacune des zones 1, 3 et 4, et 1 en correspondance de la zone 2, notés sp en Fig. 8).

Un résumé des circuits existant et de leurs caractéristiques géométriques est donné dans le tableau 1. La surface d’échange totale entre les structures thermoactives et le sol est de 2353 m2, pour une longueur totale de tubes échangeurs de 8188 m.

Les tubes des circuits secondaires ont un diamètre externe de 25 mm et une épaisseur de 2,3 mm. Le circuit principal, qui relie en parallèle les 93 circuits installés dans les géostructures à la pompe à chaleur, est réalisé avec des tubes de diamètre 110 mm. Un système d’équilibrage est prévu pour uniformiser le débit rentrant dans chaque circuit secondaire. Grâce à cela, la vitesse dans chaque circuit peut être évaluée en divisant le débit total par le nombre de circuits actifs.

thumbnail Fig. 8

Géométrie et positionnement des circuits géothermiques (Aquassys, 2015).

Geometry and position of the geothermal circuits (Aquassys, 2015).

Tableau 1

Résumé des circuits géothermiques installés dans les différentes zones et leur données géométriques.

Summary of the geothermal circuits installed in the different zones.

4.3 Campagne de mesures

La première campagne de T.R.T.O. (Tests de Réponse Thermique Opérationnels) a été réalisée entre le 13 janvier et le 25 mars 2020 et elle s’est articulée en deux phases.

Pendant la phase 1, du 13 au 29 janvier 2020, les circuits activés étaient au nombre de 44 : ceux des zones 1 et 2 et ceux de la zone 5 qui se trouvent en correspondance des zones 1 et 2. Le débit moyen dans le circuit principal était de 16,2 m3/h (c’est-à-dire une vitesse d’environ 0,48 m/s, voir vprinc en Fig. 9, axe de droite), ce qui correspond à un débit d’environ 0,37 m3/h dans chaque circuit secondaire, soit une vitesse du fluide caloporteur dans ces mêmes circuits de 0,31 m/s (voir vsec en Fig. 9, axe de droite). La puissance thermique d’échange imposée était de 25 kW, soit environ 22 W/m2.

À partir du 29 janvier et jusqu’au 9 février 2020 (phase 2), uniquement la zone 1 était active, avec un total de 25 circuits secondaires et un débit moyen dans le circuit principal de 15,4 m3/h, ce qui correspond à un débit d’environ 0,62 m3/h dans chaque circuit secondaire, soit une vitesse du fluide caloporteur dans ces mêmes circuits de 0,52 m/s (Fig. 9). La puissance thermique d’échange imposée était de 21,5 kW, soit environ 33 W/m2.

Pendant toute la campagne de mesure la température minimale du fluide caloporteur était fixée à 4 °C de façon sécuritaire, pour éviter tout risque de congélation.

Les résultats des mesures effectuées sont représentés dans la figure 9 (axe de gauche) en termes de température en entrée (Tin) et sortie (Tout) du circuit principal. La figure 9 montre aussi la mesure de température ambiante externe qui a été réalisée uniquement en phase 2 (Text), et la courbe de température ambiante externe estimée (Text_extimée) pour toute la durée des T.R.T.O. à partir de ces mesures.

Travaillant en puissance imposée, la température dans le circuit n’est pas constante, mais s’adapte afin de fournir la puissance demandée. À partir de la température initiale d’environ 14 °C, elle diminue au fur et à mesure vers un plateau. Etant en mode extraction de chaleur (fonctionnement hivernal), la température d’entrée, Tin, est inférieure à celle en sortie, Tout, et la différence entre les deux permet de calculer la chaleur réellement échangée Q (en W), comme : Q=mc(ToutTin),(1) où m est le débit massique dans le circuit en kg/s et c la capacité thermique massique du fluide caloporteur en J/kg/K. La figure 10 montre les résultats en termes de puissance échangée réelle calculée selon l’équation (1), en kW, ainsi que par unité de surface de contact avec le sol, en W/m2.

Le passage en phase 2 est marqué par une augmentation de la vitesse du fluide, imposée afin de tester la possibilité d’un meilleur échange thermique (Éq. (1)), qui se traduit par une diminution de la température moyenne dans le circuit, encore largement supérieure à la limite imposée de 4 °C. Ceci montre la capacité potentielle du système à fournir jusqu’à plus de 30 W/m2.

thumbnail Fig. 9

Résultats des mesures effectuées lors des T.R.T.O. en terme de température et vitesse du fluide.

Results of in situ measurements in terms of temperature and fluid velocity.

thumbnail Fig. 10

Résultats des mesures effectuées lors des T.R.T.O. en terme de puissance échangée.

Results of in situ measurements in terms of heat exchange.

5 Modèle numérique

Un modèle numérique aux éléments finis de la gare a été réalisé afin de reproduire les mesures in situ et développer un outil de prévision et optimisation du système. Les analyses ont été réalisées à l’aide du code de calcul Comsol Multiphysics (« COMSOL Multiphysics® v5.5 »).

5.1 Géométrie, conditions de bord et propriétés des matériaux

La géométrie du modèle 3D est représentée sur la figure 11 ; cela inclut l’intégralité de la gare et tous les circuits géothermiques installés avec leurs géométries et caractéristiques (voir section précédente). Ceci a été fait avec l’objectif de tester la contribution de chaque composant (parois et radier de fondation) aux échanges thermiques, l’efficacité énergétique du système et sa rentabilité en conditions opérationnelles sur le long terme. Dans cet article uniquement les premiers résultats préliminaires sont présentés.

Les dimensions du modèle, aussi indiquées sur la même figure, ainsi que le maillage ont fait l’objet d’une étude de sensibilité afin d’en tester la validité par rapport aux effets de bord et la dépendance des résultats vis-à-vis de la taille des éléments. La face supérieure du modèle ne correspond pas au niveau du terrain naturel, mais à celui de la tête des parois moulées géothermiques, qui se trouvent à 8 m de profondeur.

La température initiale a été imposée égale à 14 °C dans tout le domaine. Les conditions de bord thermiques adoptées sont aussi illustrées sur la figure 11 : une température constante et égale à la température initiale a été imposée sur les quatre bords latéraux ainsi que sur le bas du modèle (assez loin pour ne pas influencer les résultats). La même condition de bord a aussi été appliquée sur la surface supérieure du modèle, en supposant raisonnablement que l’effet cyclique journalier de la température externe en surface ne soit pas ressenti à 8 m de profondeur. Toute la surface interne de la gare (surfaces internes des parois et du radier) ainsi que les surfaces internes des deux tunnels qui démarrent de la gare sont considérées comme des surfaces d’échange thermique convectif et le flux thermique q0 imposé sur ces surfaces vaut : q0=h(TextT),(2) avec h coefficient d’échange thermique et Text la température dans la gare supposée être cycliquement variable entre 9 et 11 °C selon les mesures in situ (voir Text_estimée en Fig. 9). Du point de vue hydraulique, le sol est considéré saturé dans tout le domaine. En l’absence d’information précise concernant la vitesse et la direction de l’écoulement souterrain sur le site d’étude, pour les simulations présentées dans cet article, l’écoulement souterrain a été pris en compte uniquement dans un deuxième temps et à travers un terme de convection thermique intégré dans le calcul des transferts de chaleur (équation de conservation de l’énergie). Les paramètres thermiques utilisés dans le modèle sont présentés dans le tableau 2. La dispersion thermique est négligée. Pour les parois et le radier, le choix de ces paramètres est basé sur les valeurs typiques du béton. Pour le sol, les valeurs ont été choisies en combinant les données disponibles dans le rapport géotechnique et les valeurs typiques issues de la littérature pour les sols rencontrés sur le site d’étude (schistes et grès fragmentés, voir Sect. 4.1). Les paramètres de l’eau sont utilisés à la fois pour l’eau souterraine et le fluide caloporteur qui circule dans les tubes (dimensions en accord avec l’équipement utilisé in situ, voir Sect. 4.2).

Tous les calculs prévoient une phase d’initialisation thermique pendant laquelle aucun circuit géothermique n’est activé. Cette phase a pour objectif d’obtenir une distribution de température la plus réaliste possible autour de la gare, basée uniquement sur l’activation des conditions de bord (notamment la température Text à l’intérieur de la gare) et pour une durée de 30 jours.

Suite à la phase d’initialisation, les simulations sont réalisées en imposant la température d’entrée dans les circuits selon les valeurs mesurées en phase 1 et 2 (Fig. 9). Pendant la phase 1, les zones 1 et 2 sont activées en imposant une vitesse de circulation du fluide caloporteur égale à 0,31 m/s dans tous les circuits faisant partie de ces deux zones. Pendant la phase 2, seulement la zone 1 est activée, en imposant une vitesse de circulation du fluide caloporteur égale à 0,52 m/s dans tous les circuits faisant partie de cette zone (voir Sect. 4.3).

La température de sortie du circuit principal est calculée en moyennant celles calculées numériquement pour chaque circuit secondaire.

thumbnail Fig. 11

Géométrie et conditions de bord du modèle numérique de la gare de Rennes (Hw=hauteur des parois ; Ww=largeur des parois ; Hs=hauteur de la dalle).

Geometry and boundary conditions of the numerical model of the Jules Ferry station (Hw=wall height; Ww=wall thickness; Hs=slab height).

Tableau 2

Paramètres thermiques utilisés dans la modélisation numérique.

Thermal parameters used in the numerical simulations.

5.2 Résultats

Les résultats obtenus numériquement sont présentés en termes de température en sortie de chaque circuit dans la figure 12, pour les éléments structurels de la zone 1 (des conclusions similaires peuvent être tirées des résultats de la zone 2). Les différents circuits sont identifiés par un code ToZxYn, où x est le numéro de la zone, Y une indication du circuit concerné (N = parois côté nord ; S = parois côté sud ; NW = parois côté ouest à nord du tunnel ; SW = parois côté ouest à sud du tunnel ; sp = circuit en spirale dans le radier en zone 5 ; U = circuit en U dans le radier) et n une numérotation des éléments.

Les résultats permettent d’évaluer la contribution des différents éléments structurels activés. Pour une même température en entrée, une température en sortie plus élevée (en hiver) signifie une chaleur extraite supérieure et donc un meilleur rendement du système (Éq. (1)). En général, les circuits en U dans le radier (courbes bordeaux dans la Fig. 12) donnent la contribution la plus importante, et ceci est liée à leur longueur de tubes qui est supérieure aux autres circuits (Tab. 1).

Pour la même raison, les circuits en spirale dans la zone 5 (courbes jaunes dans la Fig. 12) sont ceux qui donnent la contribution la plus faible. Les parois (courbes rouges dans la Fig. 12) ont une contribution intermédiaire. La différence de comportement entre les différents circuits en spirale en zone 5, ainsi qu’entre les différentes parois, est moindre, ce qui signifie que ces circuits ne s’influencent pas réciproquement. Au contraire, le comportement des circuits en U n’est pas uniforme et montre une influence réciproque due à la géométrie d’installation (U imbriqués les uns dans les autres). Vu que la zone 2 n’est pas active en phase 2, les températures des circuits de cette zone tendent à retourner vers la température initiale du sol.

La figure 13 montre la comparaison entre les résultats numériques et les mesures expérimentales des T.R.T.O., en termes de température en sortie du circuit principal, pour les phases 1 et 2. Il est possible de voir que la température de sortie calculée numériquement dans le cas sans écoulement de la nappe, est nettement inférieure à celle mesurée, To_exp. Ceci signifie que le modèle en absence d’écoulement sous-estime la capacité d’échange thermique de la structure. Afin de mieux reproduire les mesures des T.R.T.O., l’écoulement a été ici pris en compte de façon simplifiée, en rajoutant un terme de convection thermique dans l’équation de conservation de l’énergie, sans directement le modéliser (effet barrage négligé). Les résultats préliminaires sont aussi présentés dans la figure 13 et montrent que la prise en compte d’un écoulement permet de se rapprocher des valeurs mesurées pendant les essais T.R.T.O., surtout en phase 2. Il est important de souligner que l’écoulement n’est pas réellement modélisé, ce qui pourrait induire des différences significatives en matière de résultats, dû à l’effet barrage généré par la structure de la gare (Delerablee et al., 2019 ; Di Donna et al., 2021). Les mêmes résultats sont présentés dans la figure 14 mais en terme de puissance échangée par unité de surface de contact entre les structures et le sol.

thumbnail Fig. 12

Résultats numériques en terme de température en sortie des circuits de la zone 1, sans prise en compte de l’écoulement souterrain.

Numerical results in terms of outlet temperatures of the zone 1 circuits, without underground seepage.

thumbnail Fig. 13

Résultats numériques en termes de température en sortie du circuit et comparaison avec les mesures in situ.

Numerical results in terms of outlet temperature in the main circuit and comparison with in situ measurements.

thumbnail Fig. 14

Résultats numériques en termes de puissance échangée et comparaison avec les mesures in situ.

Numerical results in terms of heat exchange and comparison with in situ measurements.

6 Conclusions

Les géostructures énergétiques peuvent être des outils pertinents pour produire de l’énergie. Si les pieux énergétiques se sont bien développés dans les dernières années, il est désormais nécessaire de s’intéresser de manière plus importante aux autres types de structures souterraines (parois, tunnels) qui correspondent à une typologie de maîtres d’ouvrage complémentaire.

L’évaluation du fonctionnement énergétique et mécanique sur le long terme nécessite d’identifier et de quantifier correctement les impacts et contributions des différents éléments (sols, structure, écoulement de l’eau). Le présent article a donc proposé dans un premier temps un état des connaissances en matière de phénomènes physiques mis en jeu.

L’évaluation du fonctionnement des géostructures énergétiques et leur dimensionnement nécessitent également des outils et procédures de calcul pertinents et précis. L’analyse de la littérature a montré qu’il y avait encore peu d’analyse en retour d’ouvrages réels instrumentés, notamment des parois et radiers. Aussi dans une deuxième partie, le présent article a proposé une modélisation numérique des tests de réponse T.R.T.O. effectués sur la gare Jules Ferry du métro de Rennes.

Le modèle éléments finis 3D mis en œuvre considère explicitement tous les éléments de l’ouvrage et leur géométrie, incluant en particulier les circuits d’échange thermique. Malgré certaines hypothèses simplificatrices, il s’avère possible d’avoir une bonne reproduction des tests de réponse thermique.

L’analyse montre tout particulièrement qu’un des éléments importants de la procédure numérique est la représentation de l’écoulement de l’eau dans le sol. Par manque d’information précise sur celui-ci, une hypothèse, même simple, a permis d’approcher de manière satisfaisante les résultats expérimentaux. Ce que ne permet pas la prise en compte d’une incertitude sur les autres paramètres du problème (notamment les conductivités) en restant dans des plages de valeurs physiquement acceptables.

La même démarche pourra être utilisée dans le cas d’analyses en retour d’autres cas d’étude pour lesquels des mesures mécaniques, thermiques et hydrauliques spécifiques auront pu être mis en place (dans le sol et/ou les structures) et suivies sur une durée suffisante.

Remerciements

Le Laboratoire 3SR fait partie du LabEx Tec 21 (Investissements d’Avenir – ANR-11-LABX-0030). Les auteurs souhaitent remercier Vito Macchia pour son aide avec la création de la géométrie du modèle.

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Citation de l’article : Alice Di Donna, Fabrice Emeriault, Lionel Demongodin, Jean-François Gobichon. Aspects géotechniques et énergétiques des géostructures thermoactives : application à un cas d’étude réel. Rev. Fr. Geotech. 2020, 164, 4.

Liste des tableaux

Tableau 1

Résumé des circuits géothermiques installés dans les différentes zones et leur données géométriques.

Summary of the geothermal circuits installed in the different zones.

Tableau 2

Paramètres thermiques utilisés dans la modélisation numérique.

Thermal parameters used in the numerical simulations.

Liste des figures

thumbnail Fig. 1

Diffusion des géostructures énergétiques (a) dans différents pays et (b) depuis 1988.

World spread of energy geostructures (a) in different countries and (b) since 1988.

Dans le texte
thumbnail Fig. 2

Déformation volumétrique thermique de différentes argiles.

Thermal volumetric deformation of different clays.

Dans le texte
thumbnail Fig. 3

Comportement volumique thermique cyclique de l’argile de Genève : (a) plan œdométrique et (b) cycles thermiques (Di Donna et Laloui, 2015).

Thermal cyclic behaviour of Geneva clay: (a) oedometric plane and (b) thermal cycles (Di Donna and Laloui, 2015).

Dans le texte
thumbnail Fig. 4

Aspects géotechniques des pieux énergétiques : (a) contrainte axiale et (b) déplacement en tête induits par les variations de température (modifié d’après Di Donna et al., 2017).

Geotechnical aspects of energy piles: (a) axial stress and (b) head displacements due to thermal variations (after Di Donna et al., 2017).

Dans le texte
thumbnail Fig. 5

Abaques de puissance échangée par une paroi (droite) et un tunnel type (gauche), en fonction des conditions de sous-sol (élaborés à partir de Di Donna et Barla (2016) et Di Donna et al. (2021)).

Design charts for the estimation of heat exchange potential of a typical wall (right) and tunnel (left), as a function of underground conditions (adapted from Di Donna and Barla (2016) et Di Donna et al. (2021)).

Dans le texte
thumbnail Fig. 6

Position de la gare Jules Ferry à Rennes et contexte hydrogéologique (Terrasol, 2015).

Position and hydrogeological context of Jules Ferry station in Rennes (Terrasol, 2015).

Dans le texte
thumbnail Fig. 7

Stratigraphie à proximité de la gare Jules Ferry (Terrasol, 2015).

Stratigraphy around Jules Ferry station (Terrasol, 2015).

Dans le texte
thumbnail Fig. 8

Géométrie et positionnement des circuits géothermiques (Aquassys, 2015).

Geometry and position of the geothermal circuits (Aquassys, 2015).

Dans le texte
thumbnail Fig. 9

Résultats des mesures effectuées lors des T.R.T.O. en terme de température et vitesse du fluide.

Results of in situ measurements in terms of temperature and fluid velocity.

Dans le texte
thumbnail Fig. 10

Résultats des mesures effectuées lors des T.R.T.O. en terme de puissance échangée.

Results of in situ measurements in terms of heat exchange.

Dans le texte
thumbnail Fig. 11

Géométrie et conditions de bord du modèle numérique de la gare de Rennes (Hw=hauteur des parois ; Ww=largeur des parois ; Hs=hauteur de la dalle).

Geometry and boundary conditions of the numerical model of the Jules Ferry station (Hw=wall height; Ww=wall thickness; Hs=slab height).

Dans le texte
thumbnail Fig. 12

Résultats numériques en terme de température en sortie des circuits de la zone 1, sans prise en compte de l’écoulement souterrain.

Numerical results in terms of outlet temperatures of the zone 1 circuits, without underground seepage.

Dans le texte
thumbnail Fig. 13

Résultats numériques en termes de température en sortie du circuit et comparaison avec les mesures in situ.

Numerical results in terms of outlet temperature in the main circuit and comparison with in situ measurements.

Dans le texte
thumbnail Fig. 14

Résultats numériques en termes de puissance échangée et comparaison avec les mesures in situ.

Numerical results in terms of heat exchange and comparison with in situ measurements.

Dans le texte

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