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Rev. Fr. Geotech.
Number 164, 2020
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Article Number | 3 | |
Number of page(s) | 11 | |
DOI | https://doi.org/10.1051/geotech/2020020 | |
Published online | 11 November 2020 |
Article d’ingénierie / Engineering Article
L’analyse pétrographique : un outil de la géologie de l’ingénieur
Petrographic examination: a useful tool for the engineering geologist
1
Université Gustave Eiffel, Département GERS,
14-20, boulevard Newton – Champs-sur-Marne,
77447
Marne-la-Vallée Cedex 2, France
2
JLD-Consultant,
Paris, France
★ Auteur de correspondance : jeanne-sylvine.guedon@univ-eiffel.fr
L’examen pétrographique des matériaux rocheux utilisés en génie civil (pierres en œuvre, granulats pour béton) permet de mettre en évidence des éléments nuisibles ou des caractéristiques défavorables et, plus généralement, d’évaluer l’aptitude à une utilisation donnée, en complément d’essais pétrophysiques et mécaniques. L’accent est mis sur l’analyse pétrographique de lames minces au microscope optique polarisant, éventuellement complétée par l’examen au microscope électronique à balayage. Cette analyse peut être utilisée a priori, lors d’une recherche de matériaux, ou pour le diagnostic de désordres observés sur ouvrages. Plusieurs exemples sont donnés : dissolution ou gélifraction de calcaires, altération par lessivage des argiles dans un grès poreux, fissuration d’un marbre en œuvre sous l’effet des variations de température, aide au diagnostic de roches siliceuses vis-à-vis de l’alcali-réaction. Quelques normes ou recommandations relatives à l’examen pétrographique sont commentées. On insiste en conclusion sur les compétences, spécifiques aux questions de géologie de l’ingénieur, que doit posséder le pétrographe.
Abstract
The petrographic examination of rock material used in civil engineering (building stone, aggregates for concrete) makes it possible to point out deleterious elements or unfavourable properties and to assess the aptitude for a given use, in addition to physical or mechanical tests. We insist upon the petrographic analysis performed with a polarizing microscope and on thin sections of rock, and possibly a scanning electron microscope. This analysis may take place a priori, during a prospection of rock material, or as a diagnosis tool when degradations have appeared. Several examples are presented: dissolving process or gelifraction of limestone, weathering due to leaching of clay particles in a porous sandstone, fissuration of a marble stone due to temperature changes, detection of potential alkali-reactivity of aggregates. We then go over some standards and guidelines related to petrographic analysis. We finally insist upon the qualification and experience of the petrographer in the field of engineering geological issues.
Mots clés : pétrographie / microscope polarisant / altération / alcali-réaction / granulats
Key words: petrography / polarizing microscope / weathering / alkali reactivity / aggregates
© CFMS-CFGI-CFMR-CFG, 2020
1 Introduction
La pétrographie (du grec : description des pierres) est une branche des sciences de la Terre qui a pour but de donner une description des roches en analysant leurs caractères structuraux, minéralogiques et chimiques, pour aboutir à une classification basée sur les minéraux identifiés. La pétrographie est à différencier de la pétrologie qui met l’accent sur la genèse, la mise en place et l’altération des roches.
La pétrographie a un intérêt scientifique car elle permet de classer les roches et de les relier à l’histoire géologique d’un lieu. Elle a aussi un intérêt économique car elle permet l’identification de matières premières minérales utiles, parfois de haute valeur (minéraux contenant des terres rares, par exemple) et la qualification des matériaux de construction, qui sont pour la plupart à base minérale. Son intérêt technologique est clairement visible dans la construction d’ouvrages qui ne pourraient être réalisés sans une étude géologique de matériaux naturels et de leurs propriétés chimiques, physiques et mécaniques, et ces propriétés sont intimement liées à la pétrographie.
Le but de cet article est de montrer que cette science de l’observation est une branche importante de la géologie de l’ingénieur, insuffisamment connue et pratiquée : elle permet d’obtenir un niveau de diagnostic poussé sur les roches et les granulats (les sols fins ne seront pas abordés ici) et sur les matériaux composites, qui constituent le support, l’encaissant ou le constituant principal des ouvrages de génie civil.
2 Généralités sur la description pétrographique en géologie de l’ingénieur
Un examen à l’œil nu et avec une loupe de poche est bien entendu la première tâche du pétrographe. Complété par des tests simples (dureté, effervescence à l’acide, etc.), il permet de classer la roche dans une famille pétrographique et aussi d’apprécier certaines caractéristiques telles que la couleur ou la résistance pour les matériaux tendres. Cet examen précède toujours l’examen au microscope optique (voire ensuite l’observation au microscope électronique et la réalisation d’essais spécifiques tels que la porosimétrie) développé plus loin.
2.1 Qu’est-ce qu’une description pétrographique ?
Une description pétrographique complète consiste à :
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décrire la (micro-)texture : taille et forme des éléments et des vides, leur orientation, leur agencement, etc. ;
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identifier et décrire les minéraux présents, les phases cristallisées ou non, les pores et micro-pores, les fissures et micro-fissures (leur ouverture), les éléments organiques, etc. ;
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quantifier les proportions de ces divers constituants, par estimation visuelle ou à l’aide d’un comptage de points qui s’effectue au microscope sur des lames minces.
2.2 Pourquoi réaliser une analyse pétrographique ?
Une analyse pétrographique se fait dans un but précis. De façon générale, cette description sert à nommer une roche et à en déduire des éléments de son histoire géologique. En géologie de l’ingénieur, le but est aussi de comprendre ou d’évaluer le comportement d’une roche au regard de son utilisation (granulat pour béton hydraulique ou bitumineux, enrochement pour ouvrage à la mer, pierre en œuvre, roche mise à l’affleurement par un terrassement, encaissant rocheux d’un ouvrage souterrain, etc.) : cette roche devient alors un matériau qui sera étudié en fonction de son utilisation future.
La description pétrographique peut se faire a priori, de façon prévisionnelle lors de la recherche de matériau pour un projet d’ouvrage, ou a posteriori, après apparition de désordres sur ouvrage (elle revêt alors un caractère diagnostique).
En géologie de l’ingénieur, la description pétrographique d’un matériau rocheux a des objectifs spécifiques, les principaux étant les suivants :
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Identifier (et si possible quantifier) la présence de certains composants nuisibles (réactifs, solubles, gonflants, etc.), tels que : chlorures, sulfates comme le gypse ou l’anhydrite, phases mal cristallisées (silice des silex, par exemple), gels, sulfures comme la pyrite, argiles d’altération, minéraux fibreux, etc. ;
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Mettre en évidence des facteurs influençant le comportement mécanique et/ou la durabilité du matériau, roche ou composite : micro-fissuration, altération, minéraux abrasifs, minéraux solubles, gélivité, etc. ;
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Placer la roche dans une classification : les classifications généralistes ont leur importance car elles permettent d’avoir un langage commun, une nomenclature commune à l’ensemble des professionnels des sciences de la Terre. Les classifications académiques peuvent être assez complexes, des classifications simplifiées – parfois excessivement – sont proposées pour la géologie appliquée. Il existe aussi des classifications opérationnelles, orientées vers certaines utilisations. Elles peuvent être très frustes, comme dans le Guide pour les terrassements rocheux « GTR » (NF P-11300, 1992 : classe R des matériaux rocheux) (Tab. 1), ou plus élaborées comme les classes de réactivité alcali-granulats (NF FD P 18-542).
Il convient que l’étude soit effectuée par un géologue qualifié en pétrographie connaissant bien les matériaux utilisés dans le domaine expertisé : par exemple, il doit être averti des risques occasionnés par l’utilisation de granulats réactifs dans les bétons.
Classe des matériaux rocheux dans le GTR (NF P-11 300).
A simple rock classification: Classification of materials for use in the construction of embankments (from NF P-11 300).
2.3 Principe de l’observation pétrographique au microscope
Au microscope, on observe la roche amincie, collée sur une lame de verre appelée lame mince (Fig. 1). L’épaisseur communément utilisée est de 30 μm, épaisseur nécessaire et suffisante pour rendre la plupart des matériaux transparents aux rayons lumineux d’un microscope équipé d’une lumière transmise. De plus, c’est à cette épaisseur de 30 ± 5 μm que les caractéristiques optiques des minéraux permettent une identification rapide (cf. les ouvrages de référence en pétrographie cités en fin de document).
Le microscope utilisé est un microscope en lumière transmise avec un polariseur fixe et un deuxième polariseur escamotable, ce qui permet d’utiliser la biréfringence des cristaux pour affiner l’identification. Dans le microscope polarisant, en polariseurs croisés, le rayon lumineux traverse tout minéral cristallisé anisotrope alors qu’un minéral amorphe ou à symétrie cubique (ou un pore) apparaît noir. Ce type de microscope permet donc de faire la distinction entre deux états distincts, l’état cristallisé et l’état amorphe. Un dispositif pour photographier à différents grossissements des secteurs de lames minces permet d’illustrer le rapport d’examen pétrographique. En utilisant les fonctionnalités de logiciels du commerce ou libres de droit, il est possible de réaliser un comptage des espèces minérales présentes permettant d’estimer les proportions des minéraux.
Signalons enfin la possibilité de traitements divers préalables à l’observation (imprégnations, colorations, chauffage, attaque à l’acide, etc.), utiles pour mettre en évidence certains éléments ou certaines caractéristiques, ou de l’emploi d’une lame dite « teinte sensible » qui décale optiquement les couleurs de biréfringence d’une longueur d’onde pour une meilleure identification.
Fig. 1 Préparation d’une lame mince pour observation au microscope polarisant. Preparation of a thin section for polarizing microscope examination. |
2.4 Niveaux de précision
La question de l’échantillonnage est essentielle, comme pour tous les essais de laboratoire, qu’il s’agisse de roches massives ou de sables et graviers alluvionnaires ; il est nécessaire de disposer d’échantillons représentatifs des différents faciès reconnus par le géologue dans une carrière ou sur un sondage carotté par exemple. Compte-tenu de la taille de la lame mince et du nombre de grains qui seront représentés, il est indispensable de réaliser un quartage de l’échantillon afin de s’assurer de la représentativité des grains analysés sous le microscope. Certaines normes présentées à la section 4 fournissent des éléments statistiques concernant les quantités de matériaux à prévoir. Le nombre de lames minces nécessaires pour aboutir à une bonne analyse est laissé à la décision du pétrographe.
Si l’examen au microscope polarisant est la méthode la plus courante pour l’identification et la quantification des éléments, il ne faut pas négliger l’examen à l’œil nu puis à la loupe binoculaire d’une surface de roche cassée ou polie, ou de grains de sable. Compte tenu de l’épaisseur des lames minces, le microscope optique n’est pas adapté à l’observation d’éléments de dimension inférieure à 30 μm. Pour gagner en précision et finesse d’observation, le recours au microscope électronique à balayage (MEB) est un complément parfois indispensable, surtout lorsque le dispositif d’analyse par rayons X est utilisé, notamment pour l’identification des minéraux argileux (pour ceux-ci, la diffraction X reste l’outil classique de détermination).
3 Exemples d’études pétrographiques
3.1 Mise en évidence de l’altérabilité de différentes roches par étude pétrographique
Dans les roches calcaires, des mécanismes de réactions physico-chimiques aux interfaces solide-liquide sont très souvent à l’origine de dégradations pouvant conduire à des instabilités en falaise ou en carrière souterraine. Les altérations physiques de la roche calcaire se traduisent par une désolidarisation du squelette carbonaté mais n’entraînent pas de modification minéralogique. L’eau est en général le facteur central des altérations, au travers des mécanismes suivants :
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l’érosion mécanique contribuant à la formation de cannelures ;
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les gonflements hydriques provoquant l’apparition de fissures, voire l’éclatement de la roche ;
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les processus de gélifraction responsables de fissurations de la roche ;
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la cristallisation et l’hydratation des sels participant au développement de formes d’altérations desquamantes.
Dans les grès, c’est le ciment des grains siliceux (il s’agit souvent d’argiles plus ou moins gonflantes) qui peut évoluer défavorablement, conduisant à une perte de résistance mécanique ; un ciment carbonaté peur subir des dissolutions.
Plusieurs cas de « vieillissement » sont décrits ci-après : la dissolution d’un calcaire, la gélifraction d’un calcaire, le lessivage d’un grès et la fissuration d’un marbre.
Il est possible d’observer une modification de la texture, en particulier de la porosité de pores ou de fissures. Une résine de couleur bleue incorporée lors de la fabrication de la lame mince permet de visualiser et de quantifier l’augmentation de la porosité, que ce soit après une dissolution, ou avant et après un essai de gel-dégel ou un lessivage.
3.1.1 Cas de la dissolution d’un calcaire
La dissolution d’un calcaire par attaque acide se fait suivant une équation chimique du type suivant :
Cette dissolution constatée dans certaines pierres en œuvre est due à l’acidité de la pluie. Elle engendre une augmentation du diamètre du réseau poreux qui rend le matériau plus fragile. La mise en évidence de cette porosité créée permet un diagnostic de l’état général de la roche. Prenons comme exemple un calcaire oolithique d’âge bathonien de Bourgogne sur lequel plusieurs milieux de dissolution ont été testés : l’eau distillée, une pluie acide dont le pH est voisin de 5 et une solution saline imitant le milieu marin ; les résultats sont présentés sur les images suivantes (Figs. 2 et 3).
La figure 2a montre un échantillon sain de calcaire, l’oolithe est entouré de calcite palissadique (cristaux jointifs, allongés, se développant perpendiculairement au substrat de croissance). Après un séjour prolongé en milieu aqueux acide, on constate une augmentation du vide (espace coloré en bleu dans la figure 2b et indiqué par une flèche) entre l’auréole palissadique et l’oolithe.
Les résultats (Tab. 2) (Saad, 2012) donnés dans la première ligne sont obtenus par analyse d’une lame mince, donc en deux dimensions alors que ceux donnés dans la seconde ligne sont obtenus suite à une intrusion d’eau : c’est un calcul concernant un volume.
Entre l’échantillon sain, l’échantillon altéré à l’eau distillée (pH proche de 7) et celui altéré par une eau de pluie (pH proche de 5), on constate une augmentation de la porosité globale qui passe de 13 à 34 % lorsque l’on réalise une mesure par analyse d’images. Ces valeurs sont à comparer avec celles obtenues par un essai classique de porosité à l’eau. Il s’avère que les résultats obtenus avec les deux méthodes sont très similaires. Si l’échantillon est ensuite placé dans une solution saline saturée cette porosité se comble par cristallisation de sels pour s’abaisser à une valeur de 2 à 3 %.
L’apport de l’analyse pétrographique conduit à l’obtention d’une information supplémentaire apportée par l’analyse d’images sur des lames minces : la localisation de la porosité, mise en évidence par la coloration bleue (zone sombre en noir et blanc indiquée par des flèches). Dans le cas des calcaires oolithiques, c’est à l’interface des oolithes que se situe la zone de variation de porosité correspondant à une zone de faiblesse pouvant permettre des modifications, du volume poreux mesuré, occasionnées par la dissolution. Dans la suite du propos cette microstructure inter-oolithique peut aussi servir à créer un espace susceptible d’absorber l’augmentation de volume provoquée par le gel (l’eau entraînant une augmentation de volume jusqu’à 9 % quand elle passe de l’état liquide à l’état solide).
Fig. 2 Dissolution dans un calcaire. Images prises au microscope optique polarisant à des grossissements identiques. La base de l’image mesure une quinzaine de mm. Dissolving processes in a limestone. Petrographical microscope. Picture length about 500 µm. |
Fig. 3 Dissolution dans un calcaire oolithique. Images MEB. a : échantillon sain ; b : échantillon altéré par dissolution présentant un vide périphérique par rapport à l’oolithe dû à la dissolution (en noir sur l’image). Dissolving processes in a limestone. Petrographical microscope. a: unweathered sample from the oolithic limestone; b: weathered sample with a void due to dissolving. |
Evolution de la microstructure au cours des tests de vieillissement dans différents milieux de pH et de compositions différents. Comparaison des valeurs de la porosité évaluée par analyse d’image et mesurée par intrusion d’eau.
Changes in the microstructure after accelerated age tests in different environments (pH, acid or saline solution). Comparison of the porosity evaluated from image analysis and from water saturation.
3.1.2 Cas de la gélifraction d’un calcaire
Sur une lame mince de calcaire oolithique imprégnée d’une résine colorée en bleu, l’augmentation de la porosité de l’échantillon est nettement visible après les cycles de gel-dégel, le liseré poreux s’élargit au cours des cycles (Fig. 4) et il permet sans doute d’absorber tout ou partie de l’augmentation de volume générée lors de l’alternance entre la période de gel et celle de dégel.
Après 20 cycles de gel/dégel (Fig. 4b), l’espace poreux créé en périphérie de chacune des oolithes rend le matériau perméable. L’alternance de cycles gel-dégel fragilise la microstructure générant un espace poreux inter-oolithes, susceptible de se remplir d’eau à chaque phase de dégel. Au gel suivant la pression est telle qu’elle engendre une fissuration (Fig. 4c) qui progresse au fur et à mesure des cycles, entraînant une fatigue voire une ruine du matériau.
L’analyse pétrographique permet une visualisation, une localisation et une quantification de la porosité créée lors de l’alternance de cycles de gel-dégel, et une mise en évidence de la fissuration engendrée par ces cycles rendant possible la mesure de l’ouverture de la fissure (ici d’environ 50 μm). Le repérage puis la répartition des fissures donne une appréciation de l’état de fatigue de la pierre et de son degré de dégradation.
Fig. 4 Fissuration d’un calcaire oolithique après cycles de gel-dégel. (microscope optique polarisant). a : échantillon sain ; b : Échantillon de calcaire oolithique soumis à 20 cycles. La base de l’image mesure une quinzaine de mm ; c : Mise en évidence de la fissuration engendrée par les cycles de gel-dégel ; la largeur de l’image est d’environ 4 mm. Fissuration of a limestone after freeze-thaw cycles. Polarizing microscope. a: Unweathered sample (picture length about 15 mm); b: Sample after 20 cycles (picture length about 15 mm); c: Idem (picture length: 4 mm). |
3.1.3 Cas du lessivage d’un grès
D’autres types de roches que le calcaire sont susceptibles de subir des altérations météoriques. Citons l’exemple d’un grès utilisé en bordures de trottoir et ayant subi des dégradations moins de deux ans après la mise en service de la voirie. Le grès expertisé présentait une usure de surface rendant la circulation des piétons dangereuse et une fissuration prématurée des bordures. Ce grès dont les grains de quartz sont cimentés par des argiles a été utilisé dans une région particulièrement pluvieuse. Possédant une porosité déjà élevée pour une utilisation en bordure de trottoir (> 20 %), ce grès s’est trouvé lessivé même en profondeur et les observations au microscope indiquent que le lessivage s’est fait au niveau des argiles contenues dans les macro-pores. Ces dernières ont disparu sur l’échantillon prélevé in situ par comparaison avec celui non utilisé qui a constitué notre référence micro-structurale : la conséquence directe en est une réduction des capacités mécaniques de la roche entraînant une usure accélérée (Fig. 5).
L’analyse pétrographique a permis de localiser les zones de lessivage à l’endroit où se situaient les argiles. Les vides sont à peu près de la taille des grains de quartz présents dans ce grès isotrope et la porosité est communicante, facilitant ainsi la circulation de l’eau et affaiblissant la microstructure. Les mesures réalisées par intrusion de mercure (porosimétrie) ont confirmé l’élargissement des capillaires : la distribution du réseau poreux s’est décalée vers des rayons d’accès de pore plus gros de 14 %, et les résultats mécaniques chutent jusqu’à 60 % par rapport aux résultats du grès sain (Saad, 2012).
Fig. 5 Lessivage d’un grès mis en œuvre en bordure de trottoir. Microscope polarisant (largeur des images : 500 µm). a : Échantillon sain de grès ; b : Échantillon de grès soumis au lessivage. Les argiles lessivées laissent des vides dont la taille est comparable à celle des grains (en sombre sur l’image) ; c et d : images macroscopiques des désordres par fissuration (c), par lessivage du grès ; la bordure s’en trouve émoussée et donc dangereuse pour les piétons (d). Leaching of a sandstone used in a kerb. Polarizing microscope (picture size: 500 µm). a: Unweathered sandstone; b: Sandstone after leaching. Clay particles are replaced by voids (dark colour); c,d: Photographs showing the macroscopic degradation of the sandstone. |
3.1.4 Cas de la fissuration sur des marbres en œuvre
De tous temps, le marbre, calcaire cristallin ayant subi un métamorphisme lié à la température, a été considéré comme une pierre noble digne d’agrémenter les plus beaux édifices. Malheureusement la durabilité de ce matériau en œuvre est médiocre et son aspect présente des dégradations au cours des siècles. Cette altération est due à la nature et à l’agencement des cristaux de calcite constituant le marbre. Ces cristaux sont légèrement solubles dans l’eau et surtout très sensibles aux variations de température du fait de leur anisotropie : le coefficient de dilatation thermique est de + 25 × 10−6/°C suivant l’axe de symétrie ternaire, et de − 5,6 × 10−6/°C dans le plan orthogonal.
Dans le but de tester un marbre classiquement employé en construction, celui-ci a été soumis à différentes températures de chauffage afin de mettre en évidence le développement de fissures : 150, 200, 300 et 400 °C. Des observations pétrographiques au microscope électronique à balayage ont été faites couplées à des mesures d’atténuation des vibrations sur les éprouvettes chauffées à des températures différentes (Fig. 7). À 50 °C (Fig. 6a), les microfissures sont intra-granulaires et les joints de grains sont élargis ; à 300 °C, les fissures sont inter- et intra-granulaires (Fig 6b). On observe (Fig. 7) l’atténuation rapide du signal lorsque la température de chauffage augmente (Saad, 2012).
L’étude réalisée au MEB sur ces différents échantillons de marbre traités ou non a permis de mettre en évidence l’apparition de fissures et leur localisation : ces dernières sont intra-granulaires à faible température (50 °C) pour devenir inter-granulaires lorsque la température dépasse la température de métamorphisation du marbre (Fig. 6). Couplée à des résultats physiques, cette analyse microstructurale a permis de préciser la nature et la localisation des altérations, puis de formuler un diagnostic sur la durabilité du matériau en œuvre. La fissuration inter-granulaire, couplée aux caractéristiques cristallographiques très anisotropes de la calcite, conduit à une déformation du marbre lorsqu’il est utilisé en plaques de faible épaisseur et en position verticale, fluage pouvant déboucher sur la rupture.
Notons que, dans ces différents cas d’altérabilité de roches, l’analyse pétrographique a permis de localiser et de quantifier les modifications de la microstructure occasionnées par la dissolution, la gélifraction, le lessivage. Cette localisation permet de progresser dans la compréhension de la microstructure et éventuellement d’émettre des hypothèses quant à la réorganisation des grains. L’analyse pétrographique vient ainsi en complément des essais physiques classiquement pratiqués.
Fig. 6 Fissuration d’un marbre en œuvre. Microscope électronique à balayage. a : Après chauffage à 50 °C ; b : Après chauffage à 300 °C. La base de l’image mesure 300 μm. Fissure development in a marble building stone. Scanning electron microscope (Picture length: 300 μm). a: After heating at 50 °C; b: 300 °C. |
Fig. 7 Résultats d’un essai de résonance (en abscisse le temps en ms, en ordonnée l’amplitude d’accélération en m.s−2. Resonance frequency test results. X-axis : time (ms). Y-axis : acceleration amplitude (m.s−2). |
3.2 Mise en évidence de la réactivité des roches aux alcalins dans les bétons
Si l’alcali-réaction n’est pas la première cause des désordres des ouvrages en béton, elle reste pour les gestionnaires d’ouvrages une grave pathologie, identifiée et étudiée depuis plusieurs dizaines d’années (Louarn et Larive, 1993 ; Le Roux et al., 1999). L’alcali-réaction trouve son origine dans la réaction de certains minéraux en déséquilibre dans le milieu très alcalin du béton.
La pétrographie est l’outil incontournable qui permet d’identifier rapidement les espèces réactives, de quantifier leur abondance et de prévoir leur accessibilité aux solutions agressives du béton (qui ont un pH hyper-basique). Certaines formes de silice plus ou moins bien cristallisées, voire amorphes, subissent des dissolutions irréversibles lorsque le pH devient hyper-basique. Ces formes de silice sont repérables en lame mince par un œil averti. Les photographies (Fig. 8) présentent plusieurs formes de silice réactives fréquemment rencontrées dans les roches : exsolutions de silice au sein d’un feldspath (8a) et quartz à extinction ondulante (8b) dans un granite (roche à texture grenue avec quartz, feldspath alcalin du type microcline, feldspaths plagioclases et biotite). Afin de mener un diagnostic pétrographique correct et ensuite pouvoir l’appliquer à la classification des roches vis-à-vis de leur réactivité potentielle, une norme française vient d’être publiée (NF XP P 18-543). Elle vient compléter les références bibliographiques citées dans ce document et consacrées à ce sujet.
L’analyse pétrographique pratiquée sur des granulats destinés à être utilisés dans un béton permet une identification des phases amorphes de silice particulièrement délétères comme l’opale par exemple (Le Roux, 1991). La quantification des formes de silice réactives dans un granulat est le critère de choix de ce dernier pour son utilisation dans une formulation de béton (Fernandes et al., 2015b). Une solide connaissance de toutes les espèces de silice est donc le pré-requis pour mener à bien cette étude pétrographique et orienter le choix d’un granulat. La quantification de ces espèces est indispensable pour pouvoir se placer vis-à-vis des seuils imposés par les normes. Ces dernières années, plusieurs auteurs ont publié des ouvrages et atlas largement illustrés permettant au lecteur d’affiner son diagnostic (Le Roux et al., 1999 ; Lorenzi et al., 2006 ; Fernandes et al., 2013, 2015a).
Fig. 8 Différentes formes de silice réputées délétères vis-à-vis de l’alcali-réaction dans un granite. Microscope optique polarisant. La base des images mesure une quinzaine de mm. Lumière polarisée-analysée. a : exsolutions de silice ; b : quartz à extinction ondulante. Various types of silica deemed to be deleterious in a granite. Polarizing microscope. Picture length: about 15 mm. a: silica exsolutions in a feldspath; b: quartz showing sweeping or undulatory extinction when rotated. |
3.3 Rétro-analyse de bétons âgés de plusieurs dizaines d’années
Afin d’asseoir le diagnostic pétrographique, une rétro-analyse a été menée sur des bétons âgés de plusieurs dizaines d’années et qui présentaient des désordres typiques dus à l’alcali-réaction. Pour mener cette rétro-analyse, des bétons du Mur de l’Atlantique ont été échantillonnés. Âgés de plus de 70 ans, ayant été fabriqués dans des conditions dictées par l’urgence de la guerre, et ayant subi une forte altération due à l’eau de mer, ces bétons ont semblé être les candidats idéaux.
Cette étude (Guédon et al., 2007), tant du point de vue de la pétrographie des granulats que de la chimie du béton, a permis de mettre en évidence les espèces pétrographiques ayant été à l’origine des pathologies diagnostiquées et en particulier celles dues à l’alcali-réaction (Figs. 9 et 10).
Fig. 9 Gel d’alcali-réaction mis en évidence au microscope pétrographique avec ajout d’une lame dite « teinte sensible ». Largeur de l’image : environ 15 mm. Gel from alkali-silica reactions in a concrete thin section using a wavelength plate. Picture length: about 15 mm. |
Fig. 10 Blockhaus éboulé à Sainte-Marguerite-sur-Mer en Normandie. Fallen blockhouse at Sainte-Marguerite-sur-Mer (Normandy). |
4 Analyse succincte de quelques normes, ou textes faisant office de normes, traitant de pétrographie
Il existe un certain nombre de textes normatifs ou équivalents qui traitent de l’identification et de la description pétrographique. La plupart sont très sommaires, comme la norme européenne « Identification, description et classification des roches » (NF EN ISO 14689, 2017) qui n’aborde pas les techniques d’observation et fournit un tableau très simplifié de classification des roches. Signalons que ces normes n’ont pas pour but de remplacer les manuels de pétrographie qui traitent de la reconnaissance des minéraux, que ce soit à l’œil nu ou au microscope (Roubault et al., 1963 ; Lucas et al., 1976 ; Bard, 1990 ; Mac Kenzie et Guilford, 1995 ; Mac Kenzie et al., 1995 ; Adams et al., 1995 ; Yardley et al., 1995 ; Nesse, 2009 ; Ingham, 2011 ; Beaux et al., 2012).
Il faut d’abord citer la « Suggested Method for Petrographic Description of Rocks », recommandation pour la description pétrographique des roches (ISRM, 1978). Si ce document est trop bref (3 p.) pour pouvoir fournir une aide opérationnelle, il a le mérite d’avoir attiré très tôt l’attention sur l’examen pétrographique et sur ce qu’il peut apporter aux mécaniciens des roches. Il se concentre sur l’examen en lame mince au microscope polarisant : minéraux présents, micro-fracturation, taille des grains, structure.
Parmi les premiers textes français à mentionner, la norme P 18-557 « Éléments pour l’identification des granulats » insiste, dans les années 1990, sur la description pétrographique à l’aide de la loupe binoculaire et du microscope polarisant. La norme NF EN 932-3, quant à elle, spécifie la procédure de base à suivre pour l’examen pétrographique simplifié des granulats d’origine naturelle et fournit une nomenclature générale. Il est aussi indiqué que l’examen doit être effectué par un géologue qualifié (pétrographe) connaissant bien les matériaux utilisés en génie civil. Des règles d’échantillonnage sont données et nous croyons utile de rappeler ici le tableau indiquant les quantités minimales de matériau à prélever (Tab. 3).
Les textes normatifs les plus précis et complets sont orientés vers une application particulière, mais les méthodes et les procédures utilisées sont en partie transposables à d’autres applications. Quelques-uns de ces textes sont commentés ci-dessous :
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Méthode pétrographique pour la détection de granulats potentiellement réactifs aux alcalis (RILEM, 2003).
L’objectif fixé est de classer un échantillon de granulats selon sa susceptibilité à l’alcali-réaction, à partir d’une analyse pétrographique. Il est souligné que cette analyse doit être réalisée par un pétrographe connaissant les constituants du béton et capable d’identifier les éléments pertinents. Deux niveaux d’observation : examen visuel ou à la loupe binoculaire (grains > 4 mm) ; examen au microscope sur lames minces avec comptage de points (montage de plusieurs grains < 4 mm sur une lame). La détermination quantitative des constituants permet d’évaluer la classe de réactivité (trois classes). En annexe de cette méthode sont donnés :
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des abaques permettant d’estimer la précision statistique d’un comptage de points ;
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une nomenclature pétrographique (4 tableaux – roches sédimentaires, magmatiques, métamorphiques, artificielles – mentionnant les constituants à risque pour chaque roche) ;
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des exemples de descriptions pétrographiques.
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Bonnes pratiques pour l’examen pétrographique du béton durci (ASTM C 856-04, 2004)
Cette norme est applicable aux bétons, mortiers, coulis, plâtres, etc. On y insiste sur la qualification du pétrographe (au moins cinq ans d’expérience d’examen pétrographique de béton...). Cette norme est axée sur la préparation des échantillons, sur les méthodes (examen visuel, loupe binoculaire, microscope polarisant, y compris avec imprégnation à l’acétate d’uranyle) et sur le matériel nécessaire. Des tableaux présentent des check-lists pour la description à l’œil nu, à la loupe binoculaire ou en lame mince. Deux tableaux complémentaires sont fournis : tableau d’aide à l’étude de bétons ayant subi un incendie ; tableau d’aide à l’identification des minéraux secondaires (carbonates, portlandite, opale, etc.).
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Procédure pour l’analyse pétrographique des granulats grossiers (Ontario Ministry of Transportation, 2013).
Il est supposé que l’analyse est réalisée par une personne qualifiée en géologie des granulats. La procédure comprend un examen visuel et une description pétrographique d’un échantillon de granulats, une évaluation du pourcentage de chaque constituant et une notation pondérée de leur qualité (« nombre pétrographique » : P.N.). Un tableau permet le calcul du P.N. à partir du pourcentage de minéraux classés sommairement en : « good, fair, poor, deleterious ». Une annexe précise, pour chaque type pétrographique, les caractéristiques qui permettent de le placer dans une des quatre classes ci-dessus, fondées principalement sur la résistance évaluée « à la main » ou sur l’état d’altération.
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ASTM C 295M Standard Guide for Petrographic Examination of Aggregates for Concrete, 8 p.
Les objectifs de l’examen pétrographique doivent être fixés par l’utilisateur. La norme est toujours en vigueur, elle est assez explicative et encadre bien la démarche.
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Méthode pour l’analyse pétrographique des granulats grossiers (Procedure for the petrographic analysis of coarse aggregate, Ontario Ministry of Transportation, 2013)
Le texte décrit la préparation (collage des grains de sable, triés par classe granulométrique, sur une lame, etc.) puis le comptage de points au microscope permet de déterminer la proportion des principales espèces minérales, notamment les silex.
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Examen pétrographique des pierres naturelles (NF EN 12407, 2007)
Cette norme déjà ancienne donne quelques indications sur la confection des lames minces. Elle précise ce que doit comporter une description à l’œil nu et une description au microscope. Pour celle-ci, sont mentionnés : les minéraux et grains (pourcentage, dimensions, forme, orientation, etc.), la matrice, les discontinuités. La description aboutit à une définition pétrographique. Des tableaux présentent des modèles pour chaque grande famille de roche (sédimentaire, métamorphique, effusive, etc.).
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Pétrographie appliquée à l’alcali-réaction (NF XP P 18-543)
Cette norme française, d’une vingtaine de pages, a pour but de définir la procédure à suivre pour l’examen pétrographique des granulats afin de déterminer leur nature dans un premier temps et leur réactivité éventuelle : non réactif (NR), potentiellement réactif (PR) ou potentiellement réactif à effet de pessimum (PRP), dans un deuxième temps. Là aussi, la qualification du pétrographe est jugée essentielle, ce dernier devant connaître les matériaux du génie civil et le phénomène d’alcali-réaction. Des consignes sur l’échantillonnage et sur la préparation des lames minces sont données, qu’il s’agisse de roches massives ou d’alluvionnaires. Deux niveaux d’observation : loupe et loupe binoculaire ; microscope optique. Pour ce dernier, on rappelle les éléments à observer : texture, minéraux présents, pores et fissures, espèces réactives (un tableau de ces espèces est donné). La détermination quantitative est faite par comptage de points. En annexe de ce document, des photographies de lames minces illustrent certaines techniques d’imprégnation.
Relation entre la plus grande taille de particule D et la masse minimale d’échantillon Q.
Largest particle diameter D versus mass Q of material to be collected.
5 Conclusion
Le lecteur aura été convaincu de l’intérêt, et dans certains cas de la nécessité, de l’examen pétrographique, notamment à l’aide du microscope optique : c’est une approche complémentaire des essais d’identification et des essais mécaniques (porosité, absorption d’eau, essai au bleu de méthylène, vitesse ultrasonore, micro-deval, etc.) qui aboutit à une connaissance et à une caractérisation opérationnelle des matériaux. Cet examen détaillé et spécialisé permet en particulier de mettre en évidence les modifications dues à une altération et la localisation micro-structurale de ces modifications.
Le potentiel de l’examen au microscope polarisant, trop peu souvent pratiqué, doit être souligné d’autant plus que, hormis le microscope, il ne nécessite pas de disposer de matériel spécifique ni d’un laboratoire avec paillasses. La confection des lames minces peut être sous-traitée sans difficulté. Cette technique diagnostique peut être complétée par des observations au microscope électronique à balayage et par les analyses élémentaires obtenues par l’intermédiaire d’une sonde à dispersion d’énergie (EDAX), ainsi que par diffraction des rayons X qui permettra aussi de préciser l’état de cristallisation des échantillons observés. L’analyse chimique, quant à elle, pourra fournir des précisions sur des teneurs en éléments particulièrement impliqués dans l’alcali-réaction comme la silice et les alcalins (Louarn et Larive, 1993 ; Guédon-Dubied et al., 1992 ; Guédon-Dubied et Martineau, 1999).
Comme cela est rappelé dans plusieurs normes citées plus haut, la formation des pétrographes spécialisés en géologie de l’ingénieur est essentielle : aptitude à reconnaître certains éléments ou certaines caractéristiques spécifiques à la géologie de l’ingénieur, aptitude qui ne figure pas dans le cursus classique des étudiants géologues mais qui est pourtant la garantie de la réussite d’un diagnostic.
Des essais croisés ayant pour but de valider le mode opératoire décrit dans la norme XP P18-543 ont été réalisés en 2016 et 2018. Seize laboratoires ont participé et ont pris en charge la fabrication des lames minces et leur observation. L’examen et l’identification classique des minéraux a été correctement menée et les laboratoires universitaires qui proposent cette prestation obtiennent des résultats corrects : ils sont donc susceptibles d’apporter leur concours et apporter des réponses pertinentes. Concernant l’analyse pétrographique des granulats vis-à-vis de l’alcali-réaction, la fiabilité du résultat a été moins bonne. Il est à souligner que cet examen pétrographique est la porte d’entrée d’une démarche méthodologique décrite dans la norme (NF FD P 18-542) et que la démarche se poursuit par la réalisation d’essais de laboratoires normalisés eux-aussi (NF P 18-594).
Pour ce qui concerne les normes et documents apparentés, s’il est illusoire de vouloir « normer » tout le processus d’observation pétrographique, en particulier la reconnaissance des minéraux, le choix et la préparation des échantillons peuvent être utilement guidés par ces documents méthodologiques et une check-list des principaux éléments à observer, en relation avec un objectif donné, peut constituer une aide pour le pétrographe.
Normes et méthodes
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Citation de l’article : Jeanne-Sylvine Guédon, Jean-Louis Durville. L’analyse pétrographique : un outil de la géologie de l’ingénieur. Rev. Fr. Geotech. 2020, 164, 3.
Liste des tableaux
Classe des matériaux rocheux dans le GTR (NF P-11 300).
A simple rock classification: Classification of materials for use in the construction of embankments (from NF P-11 300).
Evolution de la microstructure au cours des tests de vieillissement dans différents milieux de pH et de compositions différents. Comparaison des valeurs de la porosité évaluée par analyse d’image et mesurée par intrusion d’eau.
Changes in the microstructure after accelerated age tests in different environments (pH, acid or saline solution). Comparison of the porosity evaluated from image analysis and from water saturation.
Relation entre la plus grande taille de particule D et la masse minimale d’échantillon Q.
Largest particle diameter D versus mass Q of material to be collected.
Liste des figures
Fig. 1 Préparation d’une lame mince pour observation au microscope polarisant. Preparation of a thin section for polarizing microscope examination. |
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Dans le texte |
Fig. 2 Dissolution dans un calcaire. Images prises au microscope optique polarisant à des grossissements identiques. La base de l’image mesure une quinzaine de mm. Dissolving processes in a limestone. Petrographical microscope. Picture length about 500 µm. |
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Dans le texte |
Fig. 3 Dissolution dans un calcaire oolithique. Images MEB. a : échantillon sain ; b : échantillon altéré par dissolution présentant un vide périphérique par rapport à l’oolithe dû à la dissolution (en noir sur l’image). Dissolving processes in a limestone. Petrographical microscope. a: unweathered sample from the oolithic limestone; b: weathered sample with a void due to dissolving. |
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Dans le texte |
Fig. 4 Fissuration d’un calcaire oolithique après cycles de gel-dégel. (microscope optique polarisant). a : échantillon sain ; b : Échantillon de calcaire oolithique soumis à 20 cycles. La base de l’image mesure une quinzaine de mm ; c : Mise en évidence de la fissuration engendrée par les cycles de gel-dégel ; la largeur de l’image est d’environ 4 mm. Fissuration of a limestone after freeze-thaw cycles. Polarizing microscope. a: Unweathered sample (picture length about 15 mm); b: Sample after 20 cycles (picture length about 15 mm); c: Idem (picture length: 4 mm). |
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Dans le texte |
Fig. 5 Lessivage d’un grès mis en œuvre en bordure de trottoir. Microscope polarisant (largeur des images : 500 µm). a : Échantillon sain de grès ; b : Échantillon de grès soumis au lessivage. Les argiles lessivées laissent des vides dont la taille est comparable à celle des grains (en sombre sur l’image) ; c et d : images macroscopiques des désordres par fissuration (c), par lessivage du grès ; la bordure s’en trouve émoussée et donc dangereuse pour les piétons (d). Leaching of a sandstone used in a kerb. Polarizing microscope (picture size: 500 µm). a: Unweathered sandstone; b: Sandstone after leaching. Clay particles are replaced by voids (dark colour); c,d: Photographs showing the macroscopic degradation of the sandstone. |
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Dans le texte |
Fig. 6 Fissuration d’un marbre en œuvre. Microscope électronique à balayage. a : Après chauffage à 50 °C ; b : Après chauffage à 300 °C. La base de l’image mesure 300 μm. Fissure development in a marble building stone. Scanning electron microscope (Picture length: 300 μm). a: After heating at 50 °C; b: 300 °C. |
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Dans le texte |
Fig. 7 Résultats d’un essai de résonance (en abscisse le temps en ms, en ordonnée l’amplitude d’accélération en m.s−2. Resonance frequency test results. X-axis : time (ms). Y-axis : acceleration amplitude (m.s−2). |
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Dans le texte |
Fig. 8 Différentes formes de silice réputées délétères vis-à-vis de l’alcali-réaction dans un granite. Microscope optique polarisant. La base des images mesure une quinzaine de mm. Lumière polarisée-analysée. a : exsolutions de silice ; b : quartz à extinction ondulante. Various types of silica deemed to be deleterious in a granite. Polarizing microscope. Picture length: about 15 mm. a: silica exsolutions in a feldspath; b: quartz showing sweeping or undulatory extinction when rotated. |
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Dans le texte |
Fig. 9 Gel d’alcali-réaction mis en évidence au microscope pétrographique avec ajout d’une lame dite « teinte sensible ». Largeur de l’image : environ 15 mm. Gel from alkali-silica reactions in a concrete thin section using a wavelength plate. Picture length: about 15 mm. |
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Dans le texte |
Fig. 10 Blockhaus éboulé à Sainte-Marguerite-sur-Mer en Normandie. Fallen blockhouse at Sainte-Marguerite-sur-Mer (Normandy). |
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Dans le texte |
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