Numéro |
Rev. Fr. Geotech.
Numéro 162, 2020
Amélioration et renforcement des sols
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Numéro d'article | 3 | |
Nombre de pages | 9 | |
DOI | https://doi.org/10.1051/geotech/2020005 | |
Publié en ligne | 26 juin 2020 |
Article de recherche / Research Article
Compactage Horizontal Statique : retours d’expérience
Feedback of Static Horizontal Compaction
Keller Fondations Spéciales,
Duttlenheim, France
★ Auteur de correspondance : serge.lambert@keller.com
Le procédé de Compactage Horizontal Statique, mis en œuvre pour la première fois aux États-Unis dans les années 1950 par les ingénieurs d’Hayward Baker Inc. (Groupe KELLER), a été développé considérablement par la suite, de telle sorte que depuis le début des années 1990, il trouve également une diffusion croissante en Europe (Warner J. 1982. “Compaction grouting-the first thirty years”. Gr Geotech Eng, ASCE, 1982: P694–707). Alors qu’à l’origine, les applications du procédé étaient limitées à la consolidation sous les fondations d’ouvrages susceptibles de subir des tassements, il en existe maintenant beaucoup d’autres. Aujourd’hui, les domaines d’application du Compactage Horizontal Statique sont multiples : amélioration et renforcement de sol pour des ouvrages neufs ou des reprises en sous-œuvre mais également pour des traitements de vides karstiques. Un exemple de chantier vient illustrer une application de ce procédé sous des éoliennes en mettant en évidence les avantages de ce procédé dans un contexte géotechnique difficile de zones décomprimées et de vides dans la craie jusqu’à des profondeurs de 20 à 45 m. Il a également été associé à un autre procédé de renforcement de sol par inclusions rigides pour traiter les sols superficiels. La détection et la délimitation des zones d’anomalies par des sondages destructifs avec enregistrements de paramètres n’ont pas été possibles en phase projet et ont été très compliquées en phase travaux pour garder un délai d’exécution court. Le retour d’expérience de cette opération montre que dans un tel contexte, il y a lieu de prévoir plusieurs mailles : une maille primaire lâche sur l’ensemble de l’emprise de l’ouvrage de manière à délimiter grossièrement les zones à injecter, et une maille secondaire voire tertiaire en intermaille, pour circonscrire précisément la zone d’anomalies.
Abstract
Compaction Grouting was first introduced in the 1950’s by Hayward Baker Inc. (KELLER group) and was later developed in the 1990’s in Europe. While the process was originally limited to strengthen the soil under existing foundations to limit settlement, there are many other uses today. Nowadays, the fields of application of low mobility compaction grouting are multiple: soil improvement, underpinning, soil reinforcement and void filling. For example, this technique was used recently under a wind turbine with a difficult geotechnical context where decompressed zones and voids in chalk had to be treated from a depth of 20 to 45 m. Compaction Grouting was combined with rigid inclusions which were used to treat the shallow soils. The detection and zoning of the anomaly zones were not possible during the project phase, and was very complicated during the execution phase in order to respect the schedule. Feedback from this operation shows that it is advised to execute different meshes for low mobility compaction grouting. At first, execution of a loose primary mesh on the whole project as to roughly define the areas which need to be treated further. Then, secondary and tertiary tighter meshes to treat more specifically those areas.
Mots clés : injection solide / inclusion rigide / compactage Horizontal statique / éolienne / vides / karstique
Key words: compaction grouting / rigid inclusion / static horizontal compaction / wind turbine / void / karst
© CFMS-CFGI-CFMR-CFG, 2020
1 Introduction
L’objet de cet article est de décrire la technique telle qu’elle est réalisée aujourd’hui, évoquer les bases des mécanismes implicites du Compactage Horizontal Statique et présenter un exemple d’application de ce procédé sous des éoliennes en zone karstique.
2 Principe et mécanisme
2.1 Mise en œuvre et équipement
L’injection solide (Fig. 1) consiste à incorporer dans le sol, un mortier suffisamment plastique pour former une masse homogène qui s’expanse progressivement sous l’effet de la pression d’injection (NF EN 12715). À la différence du coulis, le mortier n’imprègne pas le sol ce qui permet d’obtenir une interface bien délimitée avec celui-ci. Le mortier a pour fonction de le refouler, sans le claquer, pour le compacter : d’où son appellation de Compactage Horizontal Statique (CHS). Le mortier caractérisé par un slump inférieur à 10, pénètre dans les fissures / fractures et vides tout en ayant un volume d’injection maîtrisé. C’est un procédé ancien inventé et développé par Hayward Baker (filiale du groupe Keller) dans les années 1950.
Le claquage du sol qui doit être évité à tout prix, a pour conséquence une ouverture de fissures au sein du massif de sol entraînant une chute de la pression d’injection, une augmentation du volume à injecter, une localisation du mortier incertaine, des soulèvements en surface ou des résurgences de mortier en surface. Les causes du claquage sont nombreuses. La première cause est la pression d’injection trop élevée pour le sol. Cette pression doit être ajustée en fonction de la nature des terrains et de leur compacité mais également de la profondeur du traitement qui prédétermine la pression de confinement. D’autres paramètres interviennent également, comme une trop grande fluidité du mortier, ainsi que ses propriétés rhéologiques.
Le mécanisme de compactage est à relier directement à un système complexe de contraintes radiales et tangentielles. Le sol en périphérie immédiate du bulbe de mortier subit des cisaillements et des déformations plastiques, qui n’apportent pas directement une amélioration alors qu’en s’éloignant, le sol reste dans le domaine élastique et se densifie (Fig. 2). Dans les sols pulvérulents, la zone de plastification dont l’épaisseur reste limitée à une dizaine de centimètres, est obtenue par la combinaison des phénomènes de dilatance et de contractance, liée au mouvement relatif des éléments du squelette solide. Dans les sols argileux, la zone plastique plus épaisse est obtenue par une augmentation de la pression interstitielle et n’entraîne pas d’amélioration de la compacité voire même plutôt des diminutions au moins à court terme. Ces sols argileux peuvent se caractériser par un pourcentage de passant à 80 μm supérieur à 35 % ou un indice Ic déterminé par le pénétromètre statique supérieur à 2,6.
Il est donc important de définir une maille qui permet au rayon d’action des points d’injection qui la composent, de venir se recouvrir et d’avoir ainsi un effet également au centre de la maille. Ce rayon d’action est souvent défini par une planche d’essais, car il est lié à de nombreux facteurs : volume de mortier injecté sans claquer le terrain ou sans faire remonter le terrain, type de mortier, profondeur de l’injection, nature compacité et état hydrique du sol.
Le Compactage Horizontal Statique forme un réseau d’inclusions rigides qui permet de renforcer le sol en plus d’une augmentation importante du confinement latéral généré par le refoulement du mortier et des augmentations de compacité du sol (Bowles, 1988). L’augmentation de densité est à relier principalement au pourcentage de fines. Pour les argiles notamment si elles sont humides ou saturées, cette augmentation sera nulle. Néanmoins, quelle que soit la nature du sol, le confinement de ce dernier sera toujours augmenté avec une modification de l’état de contrainte et notamment le rapport contrainte horizontale sur contrainte verticale qui pourra dans certains cas, atteindre une valeur de 1 ou plus.
Selon les objectifs du traitement ou la nature du sol, divers critères d’arrêt peuvent être utilisés, comme l’atteinte d’une pression donnée, d’un certain volume par palier, lorsque se sont produits les soulèvements prévus au projet, ou encore d’une saturation du sol et refus. L’application du procédé est régie par la norme européenne EN 12 715.
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Fig. 1 Procédure d’exécution du Compactage Horizontal Statique. Installation method for Static Horizontal Compaction. |
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Fig. 2 Refoulement du mortier dans le sol. Mortar displacement into the ground. |
2.2 Domaine d’application
Le Compactage Horizontal Statique était à l’origine développé pour des bâtiments fondés de manière superficielle et encore aujourd’hui sa principale application reste ce type d’ouvrage, mais pour des reprises en sous-œuvre en remplacement de micropieux. Les principaux avantages sont liés à la petite perforation qui permet une intervention sur les sites exigus avec de petites foreuses et de forer en petit diamètre (80 à 110 mm) à travers les dallages, radiers, et semelles. À la différence de l’injection de coulis, la localisation du matériau injecté est davantage maîtrisée ce qui amène le cas échéant un meilleur contrôle de la densification des sols. Cependant, les remises à niveau des ouvrages sont à éviter, car l’injection peut difficilement se faire sur plusieurs points en même temps pour éviter des tassements différentiels de l’ouvrage déjà fragilisé. La reprise en sous-œuvre de pieux est également possible où en général il est réalisé au moins 3 points de CHS à proximité du pieu pour augmenter le frottement latéral et sa résistance en pointe. En zone sismique, ces injections ont la possibilité par la même occasion de réduire le risque potentiel de liquéfaction.
L’autre grande application consiste à traiter les terrains karstiques ou des vides anthropiques. Le comblement des vides importants se fait en général par des injections gravitaires de mortier ou de coulis au préalable du compactage par CHS. Le CHS est en effet prévu avant tout pour reconfiner les sols décomprimés et de bloquer les fontis. Un exemple détaillé est donné dans les paragraphes suivants pour illustrer la mise en œuvre et les contrôles.
3 Exemple d’un projet d’éoliennes en zone karstique
Dans le département de la Seine Maritime, un parc éolien composé de 10 éoliennes a nécessité une amélioration de sols afin d’envisager des fondations superficielles de type radier. L’hétérogénéité du sol du site s’est révélée très importante sous certaines éoliennes avec des zones décomprimées parfois rencontrées à des grandes profondeurs. La solution la mieux adaptée au projet a consisté à combiner deux procédés de renforcement de sol. Pour les terrains superficiels, le sol a été renforcé par des inclusions rigides, (type INSER®) et pour les profondeurs importantes par de l’injection solide de type CHS. La couche d’ancrage des inclusions rigides est prévue dans l’argile rencontrée à partir de 3 à 8 m de profondeur par rapport au TN soit environ 1 à 5 m/PFT (Fig. 5). Son épaisseur est de l’ordre de 6 à 12 m.
Les anomalies se situent à une profondeur entre 13 et 48 m/TN soit environ entre 10 et 45 m/PFT sur une épaisseur de 25 m en moyenne.
3.1 Contexte géotechnique
À partir de la carte géologique, (Fig. 3), il est possible de déterminer les risques de vides anthropiques ou naturels dans la formation de craie du Sénonien inférieur.
Sur les 2 champs d’éoliennes de 5 éoliennes chacun, une recherche de vides a été lancée dans le cadre d’une G2-AVP et d’une G2-PRO par l’intermédiaire d’une investigation géophysique par micro-gravimétrie, selon 2 profils perpendiculaires au droit de chaque emplacement d’éolienne (682 points de mesure au total) : 14 sondages pressiométriques (descendus entre 25,0 et 38,2 m de profondeur) et 41 sondages destructifs avec enregistrements de paramètres. Grâce à cette campagne il a été possible d’écarter les anomalies sur 8 éoliennes et de se concentrer sur les 2 restantes.
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Fig. 3 Vides anthropiques (carrés verts, cercles rouges et étoiles bleues sur la carte) ou naturels. Anthropogenic voids (green squares, red circles and blue stars on the map) or natural. |
3.2 Organisation du chantier
La localisation précise des zones décomprimées et vides n’a pas été effectuée au stade du projet par faute de sondages suffisants (Fig. 5). Dans ces situations, il est habituellement envisagé de traiter l’ensemble du radier, mais de manière progressive, selon une maille primaire puis secondaire voire tertiaire à chaque fois en intermaille (Fig. 4) pour obtenir finalement la maille qui avait été retenue. Cette procédure joue un rôle essentiel dans le contrôle de l’efficacité et de la qualité du traitement en cours de travaux car elle permet de limiter la montée des pressions interstitielles qui sont connues pour être préjudiciables vis-à-vis de l’amélioration des caractéristiques des sols même pulvérulents. Selon les volumes de mortier injectés, il est décidé de réaliser une maille secondaire, voire tertiaire. Dans la dernière maille, on doit observer en fin d’injection, une forte pression associée à un ralentissement de la vitesse d’injection. Les travaux commencent par les forages périphériques pour bénéficier d’un effet de confinement. Lorsque les vides ou les zones décomprimées se poursuivent en dehors de la surface de l’ouvrage, comme c’est le cas pour ces 2 éoliennes, il est en effet capital de former une barrière en débord de l’ouvrage pour encager la zone centrale.
Une autre démarche a été retenue pour ce projet. Elle a consisté à poursuivre la reconnaissance des sols en phase G3 par des sondages destructifs avec enregistrements de paramètres afin de délimiter au mieux la zone de traitement par injection. Cette approche peut avoir l’avantage de circonscrire rapidement la zone décomprimée si elle est de petite dimension et ainsi de réduire la zone d’injection. Cette information n’est pas connue à l’avance et dans notre cas de nombreuses adaptations ont été nécessaires au fur et à mesure des résultats des sondages destructifs.
En phase G3, la campagne de reconnaissance préliminaire aux travaux avait montré une zone à injecter plus importante que celle prévue initialement et sans être complètement circonscrite (Fig. 5). Par défaut de temps, les sondages n’ont pas été poursuivis. Il a été décidé de les compléter durant les travaux d’injection. Ces derniers ont débutés par la réalisation de préforages avec enregistrements de paramètres selon une maille de 4 m2.
L’utilisation de 4 foreuses différentes ont rendu l’interprétation des enregistrements de paramètres particulièrement difficile. Des corrélations entre la vitesse d’avancement et la compacité des craies ont dû établies pour chaque foreuse sachant que la méthode de forage, la profondeur, l’outil et son usure, la température de la foreuse, … interviennent dans ces relations. Un étalonnage de la vitesse maximale de descente de l’outil à vide au sein du forage a été effectué pour chacune des 4 foreuses présentent sur ce projet (Fig. 6).
Des anomalies caractérisées par la présence d’argiles ou de craies molles en profondeur, ont été mises en évidence sur une partie de l’emprise de l’éolienne et jusqu’à des profondeurs de plus de 45 m.
À partir des épaisseurs cumulées des anomalies caractérisées par des passages altérés à décomprimés et des passages très décomprimés, la cartographie de la figure 7 a pu être dressée.
On remarque une importante variabilité de l’épaisseur de passages décomprimés sur la surface de l’éolienne. Les anomalies les plus importantes couvrent une zone qui commence au centre de l’éolienne et qui s’étend vers l’Ouest et le Sud. Dans cette zone, les anomalies atteignent 24 m d’épaisseur en moyenne. La majorité de la surface de l’éolienne présente des anomalies entre 6 et 8 m d’épaisseur. La périphérie nord présente des anomalies plus épaisses avec une moyenne de 12 m d’épaisseur. Si on compare la cartographie des épaisseurs cumulées aux résultats de l’investigation géophysique par micro-gravimétrie, on retrouve une bonne similitude de la plus forte zone d’anomalie (Fig. 7).
L’intervention s’est faite à partir du niveau fond de fouille à −2,9 m/TN accessible à partir d’une rampe d’accès (Fig. 8). Les critères d’arrêt en pression et en volume d’injection ont été définis lors de la planche d’essais au démarrage du chantier. Au droit des anomalies préalablement mises en évidence par des sondages destructifs, la pression d’injection a été de l’ordre de 0,1 MPa et le volume a atteint 0,2 à 0,5 m3 par passe de 50 cm. Cette pression d’injection est à mettre en relation avec la pression limite du pressiomètre du même ordre de grandeur. Aucune surconsommation anormale de mortier mettant en évidence un vide, n’a été constatée. Ainsi, il n’y pas eu lieu d’effectuer des points d’injection complémentaire selon une maille secondaire ou tertiaire. Le mortier utilisé, comportait par m3 de mortier : 320 kg de ciment CEM1/52.5, du sable roulé 0/4 mm, des fillers calcaires et des adjuvants. Cette préparation a été livrée sèche pour ensuite être hydratée sur site de manière à obtenir un slump de 8.
Les colonnes d’injection solide sont constituées d’un mortier, dont la résistance à la compression à 28 jours est égale au minimum à 15 MPa ; avec un module E à long terme égal à 9000 MPa.
Les colonnes d’injection solide ont été réalisées selon une maille carrée de 2 m dans les zones d’anomalie. Une rangée supplémentaire a été effectuée de manière à s’assurer que la zone d’anomalie géologique a été correctement délimitée et confinée.
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Fig. 4 Disposition et séquence d’une maille triangulaire (Améliorations et renforcement des sols L. Briançon, P. Liausu, C. Plumelle, B. Simon). Triangular mesh and sequency (Améliorations et renforcement des sols L. Briançon P. Liausu, C. Plumelle, B. Simon). |
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Fig. 5 Délimitation de la zone d’anomalie en G2 Pro pour une des 2 éoliennes. Delimitation of the anomaly zone in G2 Pro for one of the 2 wind turbines. |
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Fig. 6 Résultats de la campagne de reconnaissance en G3. Sondage campaign results (G3). |
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Fig. 7 Cartographie des épaisseurs cumulées des zones décomprimées comparée à la carte d’anomalie déterminée par micro-gravitométrie. Cumulative thickness map of the weaknesses areas compared to the anomaly map determined by micro-gravitometry. |
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Fig. 8 Vue du chantier. View of the construction site. |
3.3 Solution de renforcement de sol en combinant 2 procédés
Étant donné que la réalisation des inclusions rigides intervient après la fin des injections solides, les enregistrements de paramètres des forages de CHS ont permis de préciser le modèle géotechnique. Une analyse des niveaux du toit et de l’épaisseur de la couche argileuse d’assise des inclusions rigides est effectuée à partir des cartographies de la figure 9.
Il apparaît une variation assez importante du toit des argiles très fermes situé en moyenne à 2 m par rapport à la plate-forme de travail, mais avec des profondeurs maximales pouvant atteindre 7,5 m. L’analyse de l’épaisseur de la couche d’ancrage des inclusions INSER® montre qu’elle n’est jamais inférieure à 4 m, ce qui est suffisant pour répartir les concentrations de contraintes venant de la pointe des inclusions.
Trois synthèses géotechniques sont définies pour le dimensionnement des inclusions INSER® avec à chaque fois des épaisseurs et des profondeurs des zones d’anomalies différentes (Fig. 10).
Au droit de l’éolienne qui a rencontré le plus d’anomalies, 76 points de CHS atteignant des profondeurs de 20 à 45 m ont été réalisés. Un volume de 150 m3 de mortier a été injecté. La frange supérieure des sols a été renforcée par 55 inclusions INSER® d’une profondeur moyenne de 4 m.
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Fig. 9 Cartographie du toit et des épaisseurs de la couche d’assise des inclusions rigides. Mapping of the roof level and the thicknesses of the embedded layer of rigid inclusions. |
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Fig. 10 Délimitation des 3 zones géotechniques. Delimitation of the 3 geotechnical zones. |
3.4 Dimensionnement
Le renforcement de sol par inclusions rigides INSER® et le Compactage Statique Horizontal (CHS) a pour objectif d’atteindre les performances suivantes :
-
capacité portante du sol : 155 kPa aux ELS ;
-
une raideur statique en rotation Kφ,stat > 5000 MNm/rad ;
-
une rotation du massif inférieure à 3 mm/m ;
-
une raideur dynamique en rotation Kφ,dyn > 40 000 MNm/rad de manière à éviter la résonnance du système.
Deux approches ont été effectuées par la méthode analytique (Fig. 11) et la méthode aux éléments finis (Fig. 12). La méthode analytique a permis de vérifier la portance du sol sans renforcement et de classer le sol dans le domaine 2, à savoir un sol garantissant la portance sans renforcement de sol. Pour le calcul de la déformée, une méthode par homogénéisation a été utilisée. Elle a consisté dans un premier temps à modéliser une maille élémentaire d’inclusion INSER® et de CHS à partir du logiciel TASPIE de manière à définir des modules de déformation équivalents des sols renforcés. Le calcul est basé sur la notion des fonctions de transfert (lois établissant la relation entre le frottement latéral et le déplacement du pieu d’une part, la contrainte en pointe et le déplacement d’autre part). Puis dans un deuxième temps, d’estimer les déformées du radier sous les différentes sollicitations à partir du logiciel TASPLAQ et d’un modèle de sols multicouches homogénéisés sans considérer les inclusions. Le programme TASPLAQ permet de modéliser en trois dimensions, de manière simplifiée, le cas d’une ou plusieurs plaques sur sol support élastique.
L’approche analytique par homogénéisation a l’avantage de vérifier rapidement les déformées de l’éolienne. Cependant, la prise en compte d’un module amélioré équivalent entraîne la prise en compte également d’une amélioration du module de cisaillement G, ce qui est inexacte et entraîne une sous-estimation des déformations horizontales et de la rotation du radier de l’éolienne. Il est donc préférable d’effectuer la vérification STR des inclusions rigides par la méthode aux éléments finis. Les couches de sol sont modélisées avec un modèle de comportement de type HS Small afin de prendre en compte l’évolution des caractéristiques du sol, suivant son état de contrainte, et l’augmentation du module du sol, pour de très faibles déformations. Ce modèle est bien plus précis et réaliste que le modèle classique « Mohr Coulomb ».
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Fig. 11 Résultats Taspie des mailles élémentaires d’une inclusion INSER® et de CHS®. Taspie results of elementary meshes of an INSER® and CHS inclusion. |
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Fig. 12 Résultats de calculs de PLAXIS 3D. Plaxis 3D calculation results. |
3.5 Contrôles
Les contrôles ont comporté essentiellement des sondages destructifs avec enregistrement de paramètres. En plus des 24 forages destructifs avec enregistrements de paramètres réalisés en avant-projet, 32 forages complémentaires ont été réalisés en phase travaux afin de circonscrire la zone d’anomalie. Les enregistrements de paramètres d’injection ont été effectués au droit de chaque point. Les mesures effectuées concernent les 2 paramètres de pression et de volume (Fig. 13).
Les contrôles de réception ont consisté à réaliser 10 sondages destructifs avec enregistrements de paramètres pour valider la surface de traitement et les profondeurs des injections.
La résistance du mortier est vérifiée par l’écrasement d’éprouvettes à 7 et 28 jours selon une fréquence de prélèvement (3 éprouvettes) tous les 500 m3.
Trois sondages pressiométriques ont été réalisés en intermaille après l’injection pour vérifier l’absence de vides lorsque les volumes de mortier injectés ont été très importants ou/et pour éventuellement vérifier une augmentation de la compacité. Les résultats des essais pressiométriques ont montré l’absence d’une augmentation de la compacité compte tenu de la nature argileuse et crayeuse des sols, ce qui n’exclut pas un confinement du sol généré par le refoulement latéral du mortier. L’état de consolidation du sol change et peut atteindre un état normalement consolidé pour les sols décomprimés voire surconsolidés.
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Fig. 13 Enregistrement des paramètres pression-volume pendant l’injection. Recorded parameters pressure and volume during the injection. |
4 Conclusion
Le Compactage Horizontal Statique consiste à injecter sous pression dans le sol un mortier de consistance raide à plastique. Ce mortier s’expanse de manière relativement homogène dans le sol et forme ainsi des inclusions. Le terrain environnant se trouve donc comprimé autour de l’inclusion, et sa compacité souvent augmentée. Contrairement à d’autres procédés d’injection, le mortier ne pénètre pas dans les vides interstitiels (comme lors d’une injection de coulis traditionnelle) ni ne forme des veines dans des zones de claquage, ce qui permet de mieux maîtriser les volumes injectés. Le CHS profite également de tous les avantages de la petite perforation vis-à-vis du forage à grande profondeur (30 à 50 m), de la traversée d’obstacles (béton, blocs,…) ou d’horizons de sols très compacts et de roches dures, et de l’utilisation de foreuses de tous types de gabarit (petite à grande).
La solution de Compactage Horizontal Statique a été dans le cadre de l’exemple d’éolienne en zone karstique, une solution très bien adaptée pour le contexte géologique, car les profondeurs des forages ont pu être approfondies jusqu’à atteindre 45 m sans aucune limitation liée au matériel. L’injection de mortier a été effectuée uniquement dans les zones décomprimées avec une maîtrise des volumes nécessaires pour le compactage.
Cet exemple a montré qu’il est possible et plus approprié de procéder directement à des injections CHS lorsqu’un problème de vide et/ou de zones décomprimée a été identifié sans passer par une campagne lourde de forages de reconnaissance préalable pour circonscrire précisément les zones à injecter. Elle peut démarrer dans un premier temps selon une maille lâche primaire sur toute la surface de l’ouvrage notamment s’il est de petites dimensions comme c’était le cas ici, pour identifier par l’analyse des volumes de mortier injecté les zones d’anomalies. Ces dernières nécessiteront par la suite des injections complémentaires en intermailles (secondaires, tertiaires, …) jusqu’à reconfinement des zones décomprimées ou le remplissage des vides.
Après 3 années de fonctionnement, l’éolienne montre un comportement tout à fait conforme aux attentes.
Références
- Bowles JE. 1988. Foundation analysis and design, 4th ed. Tables 3 and 4. [Google Scholar]
- NF EN 12715. Exécution des travaux géotechniques spéciaux – Injection. [Google Scholar]
- Warner J. 1982. “Compaction grouting-the first thirty years”. Gr Geotech Eng, ASCE, 1982: P694–707. [Google Scholar]
Citation de l’article : Serge Lambert. Compactage Horizontal Statique : retours d’expérience. Rev. Fr. Geotech. 2020, 162, 3.
Liste des figures
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Fig. 1 Procédure d’exécution du Compactage Horizontal Statique. Installation method for Static Horizontal Compaction. |
Dans le texte |
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Fig. 2 Refoulement du mortier dans le sol. Mortar displacement into the ground. |
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Fig. 3 Vides anthropiques (carrés verts, cercles rouges et étoiles bleues sur la carte) ou naturels. Anthropogenic voids (green squares, red circles and blue stars on the map) or natural. |
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Fig. 4 Disposition et séquence d’une maille triangulaire (Améliorations et renforcement des sols L. Briançon, P. Liausu, C. Plumelle, B. Simon). Triangular mesh and sequency (Améliorations et renforcement des sols L. Briançon P. Liausu, C. Plumelle, B. Simon). |
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Fig. 5 Délimitation de la zone d’anomalie en G2 Pro pour une des 2 éoliennes. Delimitation of the anomaly zone in G2 Pro for one of the 2 wind turbines. |
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Fig. 6 Résultats de la campagne de reconnaissance en G3. Sondage campaign results (G3). |
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Fig. 7 Cartographie des épaisseurs cumulées des zones décomprimées comparée à la carte d’anomalie déterminée par micro-gravitométrie. Cumulative thickness map of the weaknesses areas compared to the anomaly map determined by micro-gravitometry. |
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Fig. 8 Vue du chantier. View of the construction site. |
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Fig. 9 Cartographie du toit et des épaisseurs de la couche d’assise des inclusions rigides. Mapping of the roof level and the thicknesses of the embedded layer of rigid inclusions. |
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Fig. 10 Délimitation des 3 zones géotechniques. Delimitation of the 3 geotechnical zones. |
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Fig. 11 Résultats Taspie des mailles élémentaires d’une inclusion INSER® et de CHS®. Taspie results of elementary meshes of an INSER® and CHS inclusion. |
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Fig. 12 Résultats de calculs de PLAXIS 3D. Plaxis 3D calculation results. |
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Fig. 13 Enregistrement des paramètres pression-volume pendant l’injection. Recorded parameters pressure and volume during the injection. |
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